Quel avenir pour le processus démocratique ?
Les Guinéens jouent-ils à se faire peur ? Ce qui se passe au pays de Sékou Touré n’a, en effet, rien de rassurant. Après les morts et les nombreux blessés enregistrés à la suite de la manifestation de l’opposition, on se demande bien ce que nous réserve l’avenir en Guinée. Sur le chemin des élections législatives prévues pour le 29 décembre prochain, bien des choses risquent de se passer. Elles devaient se tenir 6 mois après l’élection présidentielle selon les termes de l’accord de Ouaga. Seulement, le fichier électoral n’est pas du goût du président Alpha Condé qui veut tout remettre à plat. Une revendication d’habitude formulée par les opposants en Afrique. Ce faisant, si le président guinéen abhorre les démarches consensuelles sur ces questions, c’est que l’enjeu en vaut la peine. Il serait, sur toute la ligne, le grand gagnant dans cette affaire s’il s’assurait la majorité à l’Assemblée nationale. Pour autant, doit-il s’arroger le droit de mettre le pays en danger en empêchant l’opposition de manifester ? Tout se passe comme si Alpha Condé avait maintenant peur du jeu démocratique qui lui a permis d’arriver au pouvoir. On n’ose pas imaginer la spirale de violences que la Guinée aurait vécues si Cellou Dalein Diallo avait refusé de reconnaître les résultats de l’élection présidentielle et avait appelé ses partisans à manifester. Le président guinéen semble donc suivre les chemins tortueux de ces dirigeants qui haïssent le partage du pouvoir et s’ingénient à manœuvrer pour maîtriser les processus électoraux dans leurs pays. Il faut souhaiter que le vieil opposant se ravise et ne rompe pas le fil du dialogue avec l’opposition. Les risques que font courir tous ces évènements sur la suite du processus ne l’autorisent pas à foncer tête baissée pour conforter les assises de son parti. De plus, on n’a pas beaucoup entendu les membres du groupe de contact sur la Guinée qui ont l’obligation de rester aux côtés de ce pays. Or, tant que les institutions démocratiques ne seront pas totalement mises en place, il serait difficile de penser à une certaine stabilité nécessaire pour le décollage de ce pays. Après 50 ans de régimes d’exception, faut-il comprendre par les atermoiements du camp Condé que le changement n’est pas pour demain, même chez ces opposants qui ont vieilli sous le harnais ? En un an de règne, Condé n’a pas encore convaincu sur sa volonté réelle de parachever l’architecture démocratique de son pays. Dans l’intérêt de la Guinée, il doit éviter de changer les règles du jeu, acceptées par tous avant son accession à la magistrature suprême.
Dayang-ne-Wendé P. SILGA
Les Editions du Pays
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