Alpha Condé, de nouveau sur RFI
Dans une interview accordée le 18 mai dernier à RFI, Alpha Condé revient sur certains points qui, comme d'habitude, méritent le détour. Il évoque notamment François Hollande, les élections législatives en Guinée, Alassane Ouattara, la Françafrique et le franc CFA.
Alpha Condé, le PS et François Hollande
Alpha Condé affirme que le RPG est de la même tendance politique que le PS. Certes les deux partis sont membres de l'Internationale socialiste, mais c'est bien là le seul point commun qui les rassemble. Dire qu'Alpha Condé connaissait François Hollande avant qu’il ne soit président est un euphémisme et s'applique à tout Français. On rappelle qu'Alpha Condé possède la nationalité française. En outre, il précise « qu'il a passé une bonne partie de son temps en France ». CQFD.
Les exemples sollicités par le journaliste et permettant d'illustrer la nature de leurs relations, en disent long. En multipliant les mensonges, un mythomane oublie le proverbe yiddish bien connu, selon lequel « un bon menteur ne donne jamais de détails ».
Alpha Condé attend de la France : « aujourd’hui comme hier, ... qu'elle soit notre avocat, dans certains instances internationales ». Cela signifie que la Guinée n'est pas capable de défendre elle-même ses intérêts. Quelle honte !!!
Lorsqu'on demande à Alpha Condé si François Hollande effectuera une visite en Afrique, il répond favorablement, en précisant qu'il est prêt à accueillir son « camarade » en Guinée. Mais Bernard Kouchner ne correspond-il pas à l'image nouvelle que veut se donner la France en Afrique ? C'est à ce genre de questions que l'on aurait aimé avoir des réponses.
A propos des élections législatives en Guinée
Alpha Condé rappelle qu'il a « sans doute été un des dirigeants africains à avoir le plus souffert des fraudes électorales dans (son) parcours politique ».
On a donc du mal à comprendre pourquoi il ne tente pas de résoudre les problèmes actuels, liés à la tenue d’élections crédibles et transparentes, dont elles ne prennent pas le chemin.
Alpha Condé ne manque pas d'air (mais il ne faut pas oublier qu'il s'adresse à l'extérieur via RFI), quand il déclare que : « la meilleure façon de gérer les conflits, c’est de les éviter.... nous devons renforcer davantage le dialogue et la prévention des conflits ».
Alpha Condé n'a pas pris la mesure de la détermination de l'opposition. Sans rappeler les conditions dans lesquelles, il a gagné la présidentielle, il faut que ce dernier comprenne que l'opposition, à tort ou à raison selon le camp dans lequel on se place, considère qu'on lui a volé les élections présidentielles. Elle s'est promis qu'on ne l'y reprendrait plus. Considérer cela comme une fanfaronnade, serait mal connaître la volonté de cette dernière, à ne pas se faire marcher dessus une nouvelle fois. En voulant forcer la situation, Alpha Condé n'agit pas en homme d'État, obsédé qu'il est par vouloir se confectionner une légitimité qu'il ne possède pas, et qu'il ne pourra jamais obtenir. En revanche, et c'est quand même là le plus important, avec un régime présidentiel, il a largement les moyens de fonctionner et de gouverner, quand bien même l'opposition serait majoritaire à l'Assemblée. Ceux qui disent le contraire n'ont pas lu la constitution, ou sont de mauvaise foi.
Alpha Condé indique qu'il ne confirmerait une date pour les législatives, que s'il a « la certitude que toutes les conditions techniques sont réunies pour organiser les élections. Comme je n’avais pas cette certitude, j’ai dit que je ne convoquerai pas ». Il est intéressant d'indiquer qu'il parle de conditions techniques (lui seul sait ce que cela signifie) et non juridiques et/ou politiques. Ce lapsus (?) en dit long sur sa volonté réelle. Il affirme de façon péremptoire que ces élections se tiendront avant la fin 2012. En suggérant septembre à l'occasion de son séjour en Corée du Sud, il a une nouvelle fois manqué l'occasion de se taire.
Comme d'habitude, Alpha Condé veut refaire l'histoire. Lorsqu'il déclare qu'il a « voulu modifier la Céni à (son) arrivée », il déclare justement que l'opposition s'y est opposée, parce que la CENI est autonome. Par conséquent, le PRG ne pouvait modifier unilatéralement la CENI. En revanche, ce qu'il est possible de faire, c'est d'effectuer des modifications par consensus. En refusant cette voie, il montre qu'il est contre toute réforme de la CENI. CQFD.
Alpha Condé affirme à tort qu'il est le « président de tous les Guinéens. Mon rôle est de garantir la paix et l'unité nationale. Je peux encourager les partis politiques à dialoguer. Mais moi, je n'ai pas à dialoguer avec un parti ».
Alpha Condé a montré qu'il n'était pas pour la paix, mais le futur nous renseignera, et encore moins pour l'unité nationale, au vu de ses déclarations incendiaires, qu'il n'est pas utile de rappeler. En outre, dire qu'il ne peut dialoguer avec les partis, alors qu'il est lui-même le président d'un parti (le RPG), pivot de la mouvance présidentielle, est d'une hypocrisie incommensurable. Tout le monde sait que les ministres ne sont que des faire valoir, donc dialoguer avec des ministres, pour s'entendre dire « j'en réfère au PRG », c'est montrer sa désinvolture, voire un cynisme qui frise l'irresponsabilité.
D'ailleurs une table ronde a eu lieu. Des points d'accord ont été constatés, ce qui n'a absolument rien changé concrètement sur le terrain. Quant aux points de désaccord !!!
Un PRG n'est pas là pour montrer qu'il décide, y compris envers et contre tous, mais pour résoudre des problèmes. Refuser le dialogue, c'est se fermer à une solution de résolution des tensions (voire d'une crise à venir).
Alpha Condé et Alassane Ouattara
Comme à l'accoutumée, Alpha Condé joue les fanfarons en se prétendant conseiller politique d'Alassane Ouattara (qui lui, a une expérience politique, contrairement à son ainé), mais pour tempérer cette fabulation, il annonce que ce dernier le conseille au niveau économique. On constate qu'il est incapable de donner un seul exemple précis en ce sens, alors qu'il n'hésite pas à évoquer la responsabilité d'Alassane Ouattara dans la non-intégration de la Guinée à la zone CFA.
Si par ailleurs, Alassane Ouattara conseillait Alpha Condé sur le plan économique, jamais Alpha Condé n'aurait pas légiféré par décret pour intervenir dans des domaines qui ne relèvent pas de son pouvoir. Qu'on se rappelle la ferme avicole, le port de Conakry, et plus récemment la Cité chemin de fer. Quand bien même, il pourrait avoir des raisons objectives de résoudre les difficultés liées à ces dossiers sur le fond, la forme laisse à désirer, notamment pour un juriste qui se prétend professeur.
Si Alpha Condé a des conseils pertinents à donner, il ferait bien de les réserver à Lousény Camara. Ensuite est-ce Alpha Condé qui a conseillé à son collègue ivoirien de faire des élections législatives dans les délais ?
Alpha Condé oublie l'histoire de la Guinée. Contrairement à ce que raconte l'histoire officielle, il est vrai que la France a coupé les ponts avec la Guinée après le non de septembre 1958, mais c'est davantage dû à l'insistance d'Houphouët Boigny à l'époque, que de la volonté du général de Gaulle. Ceux qui en doutent n'ont qu'à interroger le Doyen Nabi Youla pour en avoir le cœur net. A défaut, les archives françaises peuvent renseigner tout chercheur qui s'intéresserait à cet épisode de l'histoire franco-guinéenne.
Les politiques peuvent bien dire ce qu'ils veulent, les investisseurs privés ont beau se bousculer (dixit le gouvernement), le fait est qu'en dehors de la Chine (un investisseur un peu particulier), personne ne mettra pour le moment un kopeck dans un pays, où un seul individu peut par décret et par lubie, exproprier un investisseur, sans autre forme de procès. Ceux qui prétendent le contraire n'ont jamais investi leur propre argent... en dehors de la Guinée.
Françafrique, franc CFA
L'anachronisme d'Alpha Condé fait honte une nouvelle fois, lorsqu'il déclare que François Hollande n'a « pas de réseaux en Afrique ». Comparer la politique africaine de la France qui dépend de nombreuses structures officielles (et nébuleuses), avec celle de la Guinée qui dépend bien souvent d'un seul homme, en dit long sur son apprentissage de la fonction présidentielle.
Ce n'est pas parce que Jospin n'avait pas de réseaux, qu'il a dit non à une intervention française en Côte d'Ivoire par exemple, c'est par conviction profonde. François Hollande s'inscrit dans la même lignée, et si Alpha Condé feint de l'ignorer en se réclamant de l'Internationale socialiste, il va au devant de graves désillusions.
On remarque également qu'Alpha Condé a mis de l'eau dans son vin, en ne condamnant pas la politique de Nicolas Sarkozy en Côte d’Ivoire, car en d'autres temps, il l'aurait fait, au nom d'un panafricanisme de bon aloi. En déclarant que : « cela concerne les Ivoiriens », il ne convainc personne, lui qui déclare plus haut, que pour ce qui concerne la Guinée, c'est la France qui doit en être l'avocate !!!
Quant à la réforme du franc CFA, le sens de l'histoire implique que la Guinée doit travailler à l'intégration africaine, ce qui passe par l'insertion à la zone UEMOA. On s'étonne qu'Alpha Condé ne l'exprime pas plus clairement, mais évoque les conseils économiques d'Alassane Ouattara pour ne pas s'aliéner certains intérêts économiques français.
La fonction présidentielle
Une nouvelle preuve du sectarisme d'Alpha Condé est visible lorsque ce dernier déclare que « beaucoup de dirigeants de l’opposition ont basculé dans la mouvance présidentielle. Beaucoup me soutiennent aujourd’hui. Tous les gens qui sont prêts à travailler avec moi, je travaille avec eux ». Autrement dit, il n'est pas possible de travailler en Guinée pour la Guinée. On est pour ou contre Alpha Condé, et seuls ceux qui sont avec lui, peuvent travailler... avec lui. Curieuse manière de défendre les intérêts… du pays !!!
Gandhi
Citoyen guinéen
« Dans tout État libre, chaque citoyen est une sentinelle de la liberté qui doit crier, au moindre bruit, à la moindre apparence du danger qui la menace » (Robespierre, Discours sur la liberté de la presse, mai 1791).
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