Lettre ouverte à un ami de l'Arc-en-ciel_RPG
Cher ami, "l'intellectuel est un esprit désintéressé, une véritable mauvaise conscience du monde, il ne doit consentir à entrer dans l'arène politique que pour défendre des valeurs universelles telles l'humanité, la justice" clame le critique, philosophe et écrivain français Julien Benda (1867-1956).
En 1927, il fustigea la démission des intellectuels dans un pamphlet qui marqua les esprits en son temps : "La Trahison des clercs", (Les Cahiers rouges, éd. Grasset, 2003). Prenant l'affaire Dreyfus comme référence, il leur reprochait de ne s'engager désormais que dans des causes particulières comme la race, la classe ou la nation.
Il avait annoncé la fin tragique des intellectuels (qu'il nomme les clercs), dénoncé leurs liaisons dangereuses avec les politiciens et brocardé le sacrifice désastreux des valeurs universelles sur l'autel de l'intérêt étroit des nationalismes.
Par contre, c'est bien au nom d'un principe abstrait, supérieur et directement opposé aux passions politiques" que Voltaire (1694-1778), le philosophe et écrivain français, s'engagea pour la réhabilitation de Jean Calas et obtint gain de cause.
En 1763, pour faire rouvrir l'enquête, le philosophe rédigea l'ouvrage "Traité sur la tolérance à l'occasion de la mort de Jean Calas".
Voltaire devient ainsi le premier écrivain français à s'engager publiquement dans une affaire judiciaire ; suivront d'autres, tels Emile Zola (1840-1902), avec son célèbre "J'accuse" en 1898 pour défendre le capitaine Alfred Dreyfus (1859-1935) victime en 1894 d'une erreur judiciaire et qui lui a valu un procès et un exil à Londres.
Le principe qui les habitait tous était tout simplement le désir de voir triompher la justice ou la vérité.
La tradition dreyfusienne n'était pas morte pour autant, puisque d'éminents "clercs", indépendamment des partis politiques, protesteront contre la torture en Algérie, et pour l'indépendance tels Jean-Paul Sartre (1905-1980), Raymond Aron (1905-1983), Jean-François Revel (1924-2006).
Aujourd'hui qu'en est-il de cette noble tradition ? Pas grand chose en réalité, car la catégorie des intellectuels a subi en Europe, en Afrique in extenso et en Guinée en particulier une sorte de "désacralisation" à cause de leur "démission".
Benda déplorait, en effet, que ces grandes personnalités n'aient pas fait beaucoup d'émules, nombre d'entre-elles s'invitant dans la cour, à la table du "Sultan" comme ironisait l'écrivain et critique littéraire Marc Lambron : "un certain nombre d'entre-eux ont négligé cette fonction morale en bataillant pour des raisons partisanes aux antipodes, éloignées de l'intérêt général".
Nous avons connu les vrais visages de beaucoup d’Africains que nous considérions jusqu’à un certain moment comme des intellectuels. Des modèles pour notre jeunesse. Hélas. Combien de traîtres?
C'est le cas de certains avec qui j'avais partagé des valeurs, des principes, des combats, des luttes pour le renouveau, la "Renaissance " de la Guinée.
Mais pour diverses raisons irrationnelles et des préoccupations alimentaires très prononcées, je déplore la nouvelle trahison des "clercs" au sein de l'intelligentsia, des "élites" et de la classe dirigeante guinéennes.
Le marasme économique, la crise morale et politique, les exactions commises dans l'entre-deux tours de l'élection présidentielle de 2010, la pratique gouvernementale ont occasionné la révélation au grand jour.
Cher ami, notre pire ennemi est notre conscience qui nous interpelle tout instant. Face au mal infini et le peu de perspectives heureuses dans notre pays, il n'est jamais trop tard pour se repentir, se "ressaisir", se réhabiliter et éviter d'être des "ralliés de la 25ème heure" en cas de nouvelle alternance en perspective, en vue. Les remords posthumes ne sont pas réparatrices des méfaits et il est grand temps de construire une digue, d'extirper le kyste, le mal de la division, d'une approche identitaire, communautaire mortifère qui mettent en péril la citoyenneté.
Cher ami, il n'est jamais trop tard pour participer activement à une opération de désaffiliation ethnique de salubrité publique pour le salut de la République.
I) Des valeurs et des luttes partagées
Cher ami, nous n’avions pas voté de la même façon lors de l'élection présidentielle de 2010 et pourtant je te comprends très bien.
Nous partagions bien des choses : l’amour de la Guinée notre patrie-mère, notre point d'ancrage, des principes démocratiques.
Nous croyions au droit des autres de penser autrement que nous.
Nous étions imprégnés de la quintessence de nos valeurs traditionnelles et morales.
Nous avions la passion de l'indépendance de la justice, d’un état de droit qui protège les plus faibles contre les plus forts et les hégémonistes.
Nous combattions ensemble, sur les pavés de Paris, en tout lieu et en tout temps, contre les violations des droits de l’homme, l'avilissement de la personne humaine, les autocrates qui accommodaient toutes les institutions à leur ambition personnelle.
Je croyais que notre compagnonnage de la 1ère République à 2010, (au même titre que la condisciplinarité et l'enfance) était le meilleur socle de l'amitié.
Bien des choses nous séparent, hélas! aujourd'hui.
Comment pouvez-vous encore soutenir quelqu’un qui renie tous vos principes, vos valeurs juste pour être élu ?
J’entends bien votre dernier argument irrationnel qui me semble infondé et inacceptable que je tairais ici ; mais je vous rappelle que le sang est mêlé en Guinée depuis des lustres, que le problème majeur est moins l'ethnocentrisme que la faillite de l'Etat qui n'a pas su jouer son rôle de régulateur social.
Cher ami, souviens-toi lorsqu'en ta présence quelqu'un avait dit qu'il rêvait de participer à la "Saint-Barthélemy " d'une ethnie. Pour rappel, le massacre de la Saint-Barthélemy du 14 aout 1572 à Paris est celui de Protestants sous l'instigation de l'influente Catherine de Médicis (1519-1589) ; outre le caractère religieux, il y avait une raison économique sous-jacente car les chrétiens étaient jaloux de la réussite économique des Protestants qu'il fallait éliminer.
Y aurait-il une similitude en Guinée ?
Comme il est bientôt question de procès en Guinée d'opposants, notre ami, qui rêvait de la "Saint-Barthélemy " d'une ethnie, pourrait y jouer le rôle de Tomás de Torquemada (1420-1498) qui s'était illustré lors de l'Inquisition espagnole en 1478 contre les Musulmans, les Protestants, les sectes et les Judaïsants.
II) Le temps des reniements
"La plus insupportable trahison, c’est tout de même celle de ces prophètes qui, las de promettre l’avènement d’une Cité qui ne vient pas, las d’entendre surtout la plainte et la protestation des hommes, finissent un jour ou l’autre dans l’uniforme des fusilleurs" fustigeait le philosophe Bernard-Henri Lévy.
Cher ami, hier des intellectuels de grand renom se firent les apologistes ou les propagandistes zélés de la barbarie communiste en URSS, en Europe de l’Est, à Cuba, au Vietnam, au Cambodge.
Aujourd'hui, votre silence presque complaisant devient insupportable et tout se passe comme si le sang des Guinéens tombés sous la répression, l'arbitraire ne pouvait bousculer que la conscience des organisations des droits de l’homme et non la votre.
"Indignez-vous!" est un essai de Stéphane Hessel (Ed. Indigène, 2011) qui défend l'idée selon laquelle « l'indignation est le ferment, le motif de base de l'esprit de résistance ». Bon nombre de Guinéens ont, hélas!, perdu ce devoir d'indignation face à certains événements majeurs qui ont parfois endeuillé notre nation.
Cher ami, je voudrais attirer votre attention sur différents points et événements à mes yeux essentiels pour lesquels vous ne vous êtes pas indigné :
- La trop longue période de transition entamée par l'accord-cadre tripartite de Ouagadougou du 15 janvier 2010 qui devait être close 6 mois après l'organisation de la présidentielle de novembre 2010. Les reports successifs des législatives et les manœuvres dilatoires ont été l'occasion d'un exercice de mauvaise foi politicienne.
"Pour le Grand Israël il est permis de mentir" disait l'ancien Premier ministre Yitzhak Shamir (1915-2012) qui a toujours considéré que les négociations avec les Palestiniens étaient un moyen de gagner du temps afin de poursuivre la colonisation de la Cisjordanie.
On avait menti en Guinée pour gagner du temps et "préparer" la victoire entre le 27 juin et le 07 novembre 2010 . Cette pratique perdure pour éviter une cohabitation dans le "pays des rivières du Sud". On veut renvoyer dos à dos le régime et ceux qui le contestent au risque de leur vie. Qui croit-on duper et au prix de quels reniements?
- La persistance de l’avilissement de la personne humaine, de la violence politique de l’Etat, de ses démembrements, de ses forces paramilitaires contre les individus, les citoyens qui est un fléau qui perdure. Du fait notamment de l’accommodement à la culture de l’impunité, de l’injustice, à la violence, aux nombreux et répétitifs manquements aux droits de l’Homme depuis les années 50.
- La répression sanglante des manifestations pacifiques due notamment au non respect et à la non garantie des libertés individuelles et collectives ; l'article 10 de la constitution de 2010 consacre le droit de manif et de cortège qui est perçu par les pouvoirs publics comme un acte de subversion et d'atteinte à la sureté de l'Etat.
- La détention illégale et longue des militants de l’opposition et de citoyens civils et militaires présumés innocents dans les prisons dans des conditions inhumaines.
- La captation des actifs et des biens de l'Etat au profit du pouvoir et de ses proches, les détournements de derniers publics, la bradage de nos ressources minières sans appel d'offre, dans l'opacité avec des marchés de gré à gré. On peut citer trois exemples de relations incestueuses entre le pouvoir politique et l'affairisme : les 25 millions $ de Palladino Capital du Sud-africain Walter Henning, les 32 millions $ de Guinomar, les 700 millions $ payés par Rio Tinto, entre autres.
- La corruption a un impact énorme sur l'état des services publics, des infrastructures tels l'équipement des hôpitaux, du système éducatif, des écoles, des tribunaux, du secteur des BTP. Dans le rapport de Transparency International publié en décembre 2011sur l'Indice de perception de la corruption des États les plus véreux, la Guinée occupe le rang de 164ème sur 185 pays ; en mars 2012 elle fait partie des 10 pays africains les plus corrompus.
Le Programme des Nations-Unies pour le développement (PNUD) a publié le classement, les résultats de l'indice de développement humain (IDH) pour 2011 où la Guinée est classée 156ème sur 169 pays.
- Le musellement de la presse privée.
- La tentation perverse du monolithisme politique partisan est une dérive totalitaire. La tentative de facto de la mise en place d'un parti unique, dominant où tous les partis de l'arc-en-ciel se fondent dans le RPG qui veut assurer le contrôle total de la politique et de la société guinéennes. "La force prime le droit" selon le chancelier allemand Otto von Bismarck-Schönhausen (1815-1898), responsable de l'échec de la démocratie en Allemagne.
- La cohésion sociale est altérée par des considérations identitaires, l'ethnostratégie, le népotisme ; alors que la cohésion sociale est un impératif de survie pour toute nation.
- La neutralité de l'administration est battue en brèche par le "spoils system" ou système des dépouilles à l'américaine : ce mécanisme repose sur le principe selon lequel un nouveau gouvernement doit pouvoir compter sur la loyauté partisane des fonctionnaires et donc remplacer ceux qui sont en place par des fidèles. Il est mis en place sous la présidence d'Andrew Jackson (1767-1845) qui, après son élection, remplace la quasi totalité de l’administration. Il considère en effet, que le peuple donne mandat au gagnant pour choisir les fonctionnaires dans ses rangs.
- Le statut international de la Guinée : alors que notre pays regorge de personnes compétentes et intègres, pourquoi vouloir faire appel encore à l’organisation "partisane" de la Francophonie (OIF) pour les législatives prochaines, après fait appel à son ingénieur informaticien au 1er tour et au malien Siaka Toumani Sangaré à la tête de la CENI au second tour de la présidentielle de 2010 ?
La Guinée est-elle, pendant la transition, un pays sous tutelle comme le Kosovo et le Timor oriental en 1999 ou sous protectorat comme Haïti en 1995 ?
- L'exclusion de la diaspora pour les prochaines législatives alors qu'elle avait voté pour la présidentielle de 2010 ; au contraire, il faudrait élargir l’offre politique au profit de la diaspora qui est sous-représentée ou rejetée lors des consultations électorales. En 2009, on a procédé à un enrôlement de 53 083 personnes sur 4 224 272 (dans 17 pays choisis arbitrairement sauf le Canada) : soit 1, 26 % du corps électoral. Alors que la diaspora est le premier opérateur économique et la 5ème région la plus peuplée. C’est un des paradoxes de la Guinée. On sait que la liste électorale est l’épine dorsale d’une élection.
Mais le droit de vote n'est-il pas un attribut de la citoyenneté ?
Cher ami, pourquoi un tel aveuglement et de l'inertie de votre part ?
Pourquoi ce manque de compassion, de clairvoyance et de discernement face à la souffrance de tes innocents et désœuvrés compatriotes ?
Nier cette réalité me rappelle le procès intenté en 1949 par le transfuge soviétique Viktor Kravchenko (1905-1966), auteur de "J’ai choisi la liberté" publié en 1946 aux Etats-Unis, aux "Lettres françaises" qui, niant l’existence des camps soviétiques, avaient osé dire que ce livre n’était qu’un "faux" fabriqué par la C.I.A.
Un autre déni de réalité concerne l’indigne plaidoirie de Maître Joë Nordmann (1910-2005), un avocat et résistant français, qui soutenait qu’en URSS, "il n’y a pas de prisons ou très peu de prisons. Les condamnations s’effectuent dans des camps de travail correspondant à nos prisons (...) La rééducation du coupable ne se fait pas dans une cellule : elle se fait par le travail, elle se fait par l’émulation. C’est un système, une pratique, fondés sur le crédit de l’homme".
Lorsqu’en 1956 au 20ème congrès du PC, les révélations du fameux rapport Khrouchtchev donnèrent au monde entier un aperçu des crimes de Staline, c’est Jean-Paul Sartre qui, dans le même esprit, déclara qu’à ses yeux, "la dénonciation publique et solennelle, l’exposition détaillée de tous les crimes d’un personnage sacré qui a représenté si longtemps le régime est une folie (...) Un régime révolutionnaire doit se débarrasser d’un certain nombre d’individus qui le menacent, et je ne vois pas d’autre moyen que la mort. On peut toujours sortir d’une prison. Les révolutionnaires de 1793 n’ont probablement pas assez tué".
A l’époque un grand nombre d’intellectuels, dont Simone de Beauvoir (1908-1986) défendaient la thèse que "la fin poursuivie (l’avènement d’une société idéale et sans classes) justifie tous les moyens mis en œuvre pour y parvenir".
Cher ami, ces dénis de réalité de négationnistes patentés constituent à mes yeux des crimes de pensées, des crimes de fait dont vous avez une grande part de responsabilité. C'est dans le même ordre d'idée et d'état d'esprit que Raymond Aron dénonça, dans son ouvrage le plus connu "L'Opium des intellectuels" (Paris, Ed. Calmann-Lévy, 1955), l'aveuglement et la bienveillance des intellectuels à l'égard des régimes communistes.
En Europe, et en Guinée où la première République de Ahmed Sékou Touré (1922-1984) a importé ce terrorisme idéologique et où on est passé des mots à la réalité quotidienne, il est permis de penser que ces doctrines troubles, parées de prophéties, ont été co-responsables du sang versé d'innocentes victimes.
Les adversaires d’Aron et soutiens du "Responsables suprême" guinéen avaient loué la révolution sans la moindre critique, avec toutes ses conséquences atroces, là où elle avait eu lieu. Ils avaient suscité de grands espoirs suivis de déceptions. Ils constituent un exemple du pouvoir homicide de la parole.
Cher ami, certains ont même promis de "parachever son œuvre, de la prendre là où il l'a laissée (sic)". Vaste programme macabre d'un funeste passé recomposé!
III) Les remords posthumes
Cher ami, notre pire ennemi est notre conscience qui nous interpelle tout instant.
Rares sont bien sûr les intellectuels ou affidés de dictateurs, d'autocrates à reconnaître non seulement les erreurs passées, mais leurs responsabilités propres dans l’accomplissement des crimes qu’ils ont couverts de leurs silences et de leurs mensonges ; et bien peu semblent disposés à faire en public leur autocritique.
Ce n'est pas le cas du repentir de l'historien et journaliste engagé Jean Lacouture, qui s’accuse dans un de ses livres, "Survive le peuple cambodgien" (Ed. Seuil, 1978), "d’avoir contribué à l’instauration de l’un des pouvoirs les plus oppressifs que l’Histoire ait connu (...) Si j’ai écrit ce livre, ce n’est pas pour me faire pardonner mais pour appliquer un contre-poison à ce peuple empoisonné et lui faire prendre une tasse de lait après l’arsenic que j’ai contribué à lui administrer (...) Pour le Vietnam, je plaide coupable. Je m’accuse d’avoir pratiqué une information sélective en dissimulant le caractère stalinien du régime nord-vietnamien (...) Je subissais l’influence écrasante de Sartre qui voyait dans toute critique de fond de la Russie soviétique une arme offerte aux réactionnaires et aux Américains. Il ne fallait pas désespérer Billancourt".
L’ancien marxiste et écrivain péruvien Mario Varga Llosa, prix Nobel de littérature 2010, confesse à son tour aujourd’hui : "Nous avons contribué à promouvoir la violence comme seule arme de justice. Malheureux, on nous a cru et cela a abouti à des dictatures". Sans doute se sait-il un peu coupable des atrocités commises au Pérou par les terroristes et les guérilleros du "Sentier Lumineux".
Si quelques intellectuels, tels qu’Albert Camus (1913-1960), François Mauriac (1885-1970), Georges Bernanos (1888-1948) ou Raymond Aron, se sont montrés plus lucides et plus courageux que beaucoup d’autres, il fallut attendre la publication en 1973 de "L’Archipel du Goulag" d’Alexandre Soljenitsyne (1918-2008), pour que de nouveaux philosophes tels Bernard-Henri Lévy et André Glucksmann s’attachent à démythifier l’Union soviétique.
Cher ami, vous commettrez une folie supplémentaire si vous vous obstinez, en ce début du 21ème siècle, à n’écouter que de faux prophètes, des mystificateurs qui n'ont comme souci que l'exercice du pouvoir à vie et ses prébendes.
Le professeur d'économie Pascal Perri ne disait-il pas que "le pouvoir est considéré comme la corbeille de la mariée".
IV) Pour une opération de désaffiliation ethnique de salubrité publique
Cher ami, j’estime que « l’intellectuel, l’élite ou l’homme public a un rôle déterminant, salvateur à jouer car il peut façonner l’esprit public ; il peut acquérir, de par son aura et sa crédibilité, une position de leader d’opinion très influent. Il est, au sens noble du terme, la mémoire, la conscience morale de son peuple ».
Il devrait songer à léguer son œuvre, son action à la postérité ; cette démarche consiste à la fois à nourrir la pensée et à rester fidèle à des convictions nobles, des principes intangibles, inaltérables en toutes circonstances. Son souci majeur, permanent devrait être la promotion et la défense de l’intérêt général, de l’unité nationale, l’exemplarité en somme.
Mais hélas ! l’élite, en Afrique in extenso et en Guinée en particulier, n’a pas toujours été à la hauteur de sa mission. Elle s’est mise, par opportunisme le plus souvent, au service d’une mauvaise cause ; elle a une lourde responsabilité sur la faillite de l’Etat, raison pour laquelle le continent africain demeure le cas social de la communauté internationale.
Par ailleurs, il est regrettable de constater que certains intellectuels ou hommes publics n’aient pas pu s’affranchir de la tutelle familiale, ethnique, régionale dans l’action publique et s’érigent même en défenseurs hargneux, sectaires du groupement humain dont ils sont issus.
D’autres n’ont pas pu résister à l’attrait, à l’avidité du pouvoir et des prébendes qu’il génère.
Leur rôle déterminant, dans la Guinée d’aujourd’hui meurtrie et inquiète pour son avenir, est de favoriser, participer activement à une opération de désaffiliation ethnique de salubrité publique.
Notre salut passera par la réhabilitation de l'école républicaine et de nos valeurs altérées par le dénuement, la misère ; car comme dirait l'autre "le besoin ébranle la vertu".
Conclusion:
Dominique Lapierre dans son ouvrage "Un arc-en-ciel dans la nuit" (Ed. Robert Laffont, 2008) a reconstitué l'épopée de femmes et d'hommes anonymes ou célèbres, Blancs ou Noirs, Européens ou Africains, qui dans le sang et les larmes ont donné le jour à cette Afrique du Sud aujourd'hui devenue la " Nation arc-en-ciel ".
Un exemple dont les hiérarques et partisans de l'Arc-en-ciel_RPG et leurs adversaires-compétiteurs devraient s'inspirer pour consolider la concorde, la cohésion sociale pour, enfin, le droit au bonheur du peuple guinéen qui doit opérer une rupture avec son passé, faire son aggiornamento, une clarification dans le jeu politique où nous passons d'un régime à un autre sans faire le bilan de ce qui nous est arrivé.
Cher ami, tu avais dit que je suis d'une naïveté confondante face aux réalités et aux enjeux ; mais sache que, comme disait Victor Hugo (1802-1885), "je préfère la conscience à la consigne" et je ne souhaite pas avaler des couleuvres jusqu'à l'indigestion comme certains.
Cher ami, chacun peut gagner, un jour, une élection. A condition de ne pas avoir, avant, perdu son âme. Car le chemin sera très long pour se rattraper.
Que Dieu préserve la Guinée et vous donne la force pour accomplir le Ramadan!
Nabbie Ibrahim « Baby » SOUMAH
Juriste et anthropologue guinéen
nabbie_soumah@yahoo.fr
Paris, le 06 juillet 2012
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