Afrique: le rapport au vitriol d’Amnesty International contre les pays riches

Amnesty International publie ce mardi 29 mars son rapport pour 2021 sur la situation des droits humains dans le monde. L’ONG y est très critique vis-à-vis des pays riches. Dans cette période touchée par la pandémie de Covid-19, elle les accuse de s’être alliés aux grands groupes privés « pour accaparer le pouvoir et les richesses ». En Afrique, le taux de vaccination très faible est dû notamment à une distribution inéquitable des vaccins, pointe Amnesty, qui accuse certains gouvernements africains de s’être caché derrière la lutte contre la pandémie pour étouffer les dissidences.

Si Amnesty présente ce mardi son rapport depuis Johannesburg, c’est pour alerter sur la situation du continent. L'Afrique a le taux de vaccination le plus faible au monde avec moins de 8% de la population entièrement protégée. La faute aux pays développés et aux multinationales estime l’ONG, qui porte un regard très sèvre sur leur (in)action.
« Des États riches ont collaboré avec des géants du secteur privé, accuse Amnesty International, pour duper les gens avec des slogans vides et de fausses promesses d’une reprise équitable après la pandémie de Covid-19 tandis que de nombreuses personnes d’Afrique se sont vu refuser des vaccins vitaux, ce qui constitue l’une des plus grandes trahisons de notre époque ». L’ONG pointe ainsi du doigt une distribution inégale de vaccins et le refus des grandes sociétés pharmaceutiques de partager leur technologie.

Les mesures anti-Covid utilisées pour étouffer les dissidences ?

Cette crise a engendré, selon l’organisation, une augmentation de la pauvreté, des inégalités et de l’insécurité. « La pandémie de Covid-19 a également mis en évidence, ajoute le rapport, le manque chronique d’investissement dans les secteurs de la santé depuis de nombreuses décennies ».
Amnesty accuse en outre certains gouvernements de s’être servis des mesures anti-Covid pour étouffer les dissidences, en interdisant les manifestations pacifiques - comme au Cameroun, au Tchad, en Côte d’Ivoire, au Lesotho et au Zimbabwe - en perturbant l’accès à Internet ou en ayant recours à « une force excessive pour briser les manifestations pacifiques ». « Au lieu de permettre la discussion et le débat si nécessaires sur la meilleure façon de relever les défis de 2021, de nombreux États ont redoublé d’efforts pour museler les voix critiques », dénonce l’ONG.
En parallèle, les violations des droits de l’homme dans les conflits sur le continent « se sont poursuivies sans relâche en 2021 », note le rapport. « De nouveaux conflits non résolus ont éclaté ou ont persisté au Mali, au Burkina Faso, au Niger, en République centrafricaine, au Nigeria, au Cameroun, en Éthiopie, au Soudan du Sud et au Mozambique, et les parties belligérantes ont violé les droits de la personne et le droit humanitaire international », juge l’organisation.

Le Conseil de paix et de sécurité de l’UA accusé d’inaction

Amnesty International se penche en particulier sur le conflit dans le nord de l’Éthiopie en pointant du doigt les « graves violations des droits de l'homme, notamment des violences sexuelles contre les femmes, des homicides illégaux et des déplacements forcés » commises par les forces de sécurité éthiopiennes et les milices. « Les forces tigréennes ont également été responsables de graves violations, ajoute le rapport, notamment d'homicides illégaux, de viols et d'autres violences sexuelles constituant des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre ».
Sur ce conflit en Éthiopie comme sur celui au Mozambique, l’ONG accuse d’ « inaction » le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine. « Malgré les récits poignants de violations des droits de l’homme qui ont continuellement émergé des conflits des deux pays, estime le rapport, le Conseil paix et sécurité est resté silencieux de façon troublante ».
Dans ce tableau très sombre, l’ONG note toutefois quelques « victoires importantes en matière de droits de l’homme » comme les libérations de dizaines de membres ou de sympathisants de partis d’opposition et de membres d’organisations de la société civile en Côte d’Ivoire et en Guinée, l’abolition de la peine de mort en Sierra Leone ou le dialogue engagé avec les manifestants pro-démocratie au royaume d’Eswatini.
RFI

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