Darfour: le procès d'un chef de milice s'ouvre devant la CPI

Un ex-chef de milice sera mardi la première personne à être jugée devant la Cour pénale internationale (CPI) pour les atrocités commises au Darfour, théâtre d'un bain de sang il y a près de 20 ans.
Au moins 45 personnes sont mortes la semaine ayant précédé ces audiences dans de nouveaux affrontements tribaux dans cette région de l'ouest du Soudan régulièrement endeuillée par des violences, selon les autorités de sécurité locales.
Ali Muhammad Ali Abd-Al-Rahman, 72 ans, collaborateur de l'ex-président soudanais Omar el-Béchir, était le chef de la milice janjawid, force supplétive du gouvernement soudanais accusée d'exactions durant le conflit du Darfour.
Egalement connu sous son nom de guerre Ali Kosheib, il est accusé de 31 chefs de crimes de guerre et contre l'humanité, commis en 2003-2004 au Darfour.
Le conflit avait éclaté à l'époque lorsque des membres de minorités ethnique avaient pris les armes contre le régime de Khartoum, dominé par la majorité arabe.
Khartoum a répondu avec les Janjawids, une force issue des tribus nomades de la région.
Des groupes de défense des droits humains ont déclaré qu'ils avaient opéré une "campagne systématique de nettoyage ethnique" ciblant les groupes ethniques Four, Masalit et Zaghawa.
Le bilan humain du conflit est estimé à 300.000 morts et 2,5 millions de déplacés, selon les Nations unies.
En avril 2007, la CPI, dont le siège se situe à La Haye, a émis un mandat d'arrêt contre M. Abd-Al-Rahman.
M. Abd-Al-Rahman a fui en République centrafricaine en février 2020 lorsque le nouveau gouvernement soudanais a annoncé son intention de coopérer avec les enquêteurs de la CPI.
Il s'est rendu en juin 2020 à la CPI après 13 ans de fuite, et dément les charges à son encontre.
- Colonel des colonels -
Selon les procureurs de la CPI, le chef de milice, soutenu par les forces soudanaises, a mené des attaques contre des villages dans la zone de Wadi Salih au Darfour en août 2003.
Au cours de ces attaques, au moins 100 villageois ont été assassinés, des femmes et des filles ont été violées et les membres du groupe ethnique prédominant Four ont été transférés de force et persécutés.
Surnommé "colonel des colonels", il est également accusé d'avoir mobilisé, recruté, armé et approvisionné les milices janjawids sous son commandement.
M. Abd-Al-Rahman étant le premier suspect à être jugé pour des crimes de guerre commis au Darfour, ce procès représente "une chance rare et longtemps attendue pour les victimes et les communautés terrorisées par les Janjawids de voir un dirigeant présumé être traduit en justice", a déclaré Human Rights Watch dans un communiqué.
Omar el-Béchir, qui a dirigé le Soudan d'une main de fer pendant trois décennies avant d'être destitué en avril 2019 après des mois de manifestations, ainsi que deux autres dirigeants sont réclamés depuis plus de dix ans par la CPI pour "génocide" et crimes contre l'humanité lors du conflit au Darfour.
Le procureur en chef de la CPI, Karim Khan, a déclaré qu'un coup d'Etat militaire au Soudan en octobre avait marqué un revers dans le travail de la Cour, le pays d'Afrique du Nord-Est étant secoué par l'aggravation des troubles.

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