Crise dans le secteur de l’éducation et situation sociopolitique en Guinée: Sanoussy Kaba, Président du parti AFC casse la baraque
Dans un entretien accordé à notre rédaction, le président du parti ‘’Alliance des Forces pour le Changement’’(AFC) s’est exprimé sur la crise que traverse actuellement notre pays.
Du système éducatif à la manifestation politique,en passant par l’installation des Points d'appuis(PA),cet ancien ministre de l’éducation Nationale a exhibé quelques pistes de solutions pour une sortie de crise rapide. On vous propose de lire ci-dessous l’intégralité dudit entretien.
Africanewsmag : Bonjour Monsieur !
M. Sanoussy Kaba : Bonjour !
Présentez-vous, s’il vous plait ?
Je suis Monsieur Sanoussy Kaba, Administrateur Civil. Président du parti AFC. J’ai un D.E.S en Economie-Gestion. Je suis Ancien Ministre de l’Education Nationale.
J’ai eu à faire des parcours pendant la première République, la deuxième République. Et si la République est une Constitution, moi je ne dirais pas troisième République, mais plutôt troisième mandature qui est celle du Professeur Alpha Condé.
Mais en principe, la République est liée à la Constitution. Donc la Constitution étant celle de la deuxième République, je dirais toujours qu’après la prise du pouvoir j’ai toujours exercé des fonctions administratives jusqu’à ce que le régime militaire s’installe.
Ensuite, j’ai été directeur des entreprises d’Etat pendant la première république, une des grandes entreprises connue de tous, qui s’appelait à l’époque CHOCOMER. Pendant la deuxième république, j’ai assumé des responsabilités entant que Directeur Général de la Société Générale des transports qui était l’ex-SOGETRAG, jusqu’au poste ministériel de l’éducation Nationale.
C’est par là que j’ai pris l’initiative de me lancer dans le développement du secteur de l’éducation où j’ai constaté qu’il y a un vide profond qu’il faut chercher à combler par les investissements.
C’est ainsi avant même mes passages au gouvernement en 1998, j’ai ouvert l’école par le Primaire, Secondaire, Lycée jusqu’à l’université. Et développer les différentes formations, aujourd’hui l’une des universités de la place (Université la Source, ndlr) qui fait la formation même en Sciences Médicales.
Comment êtes-vous arrivé en politique ?
Comme l’ambition de l’homme est toujours liée à sa volonté de satisfaire non seulement les besoins en tant qu’individu, mais aussi les besoins de la société. Alors on a dit que pourquoi pas ne pas s’intéresser à la vie de la nation en essayant d’apporter notre pierre angulaire à l’édifice national, à la construction de ce pays. Et c’est ce qui nous a motivés à créer ce parti politique AFC (Alliance des Forces pour le Changement).
Depuis quand le parti est créé ?
Le parti a été créé en 2009, dans la ferveur du multipartisme, dans l’ambition de servir notre pays. Après, nous sommes rentrés dans les courses. Nous avons appartenu à toutes les couches de combat pour l’instauration de la démocratie dans notre pays.
C‘est ainsi que les forces vives sont nées, de l’alliance des partis politiques, des syndicats et autres associations, et nous étions l’un des membres.
On a été même dans la délégation qui était chargée de négocier avec le CNDD de Dadis Camara à l’époque. C’était pour négocier pour comment aller à une transition paisible, apaisée et que la période du régime militaire ne soit pas perdurée dans notre pays.
Nous sommes allés à Ougadougou à l’époque avec tous les partis politiques dont le Pr Alpha Condé, Jean Marie Doré, Sydia Touré, Lansana Kouyaté, Cellou Dallein Diallo, François Louncény Fall, Mamady Diawara , le seule absent c’était Kassory Fofana qui avait un parti qui n’était pas à l’époque à l’envergure ou peut être qui n’ était même pas né, le GPT. Ainsi en 2010, nous n’avons pas manqué de faire notre candidature aux élections présidentielles où nous sommes allés jusqu’au payement de notre caution pour participer aux élections.
Mais fort malheureusement, nous sommes forclos pour une seule raison, puisque notre avocat qui était chargé de constituer nos dossiers a fait remplacer le casier judiciaire par le certificat de non poursuite judiciaire. La cour suprême dans son rôle régalien de rigueur a dit qu’on ne peut pas remplacer le casier judiciaire par le certificat de non poursuite judiciaire.
Ça été la cause de notre élimination bien qu’on ait payé la caution. Nous étions deux ou trois partis qui ont été frappés par cette sanction. Il y avait Mohamed Touré, Moi et Alpha Sila Bah.
Donc les autres partis sont passés, ils ont fait la campagne et on a fait des élections. Il y a eu deux gagnants pour le deuxième tour : Pr. Alpha Condé et Cellou Dallein Diallo. Après, il était question de voir quelles sont les alliances à créer. Pour quel candidat nous pouvons partir.
J’avoue que franchement nous sommes partis en bon nombre avec le RPG, c'est-à-dire le Pr Alpha Condé que nous avons tous soutenu. La raison était très simple, on avait voulu qu’à la tête de ce pays qu’il y ait un sang nouveau. C’était notre philosophie. C’est ainsi que tous nos amis et moi, nous étions 19 partis politiques, avons soutenu Alpha Condé.
Je dirais bien, Dieu aidant, celui qui était à 43% on a eu la victoire sur lui au deuxième tour. Et finalement c’est le Pr Alpha Condé qui a remporté la victoire. Vous savez ce qui est parcouru jusqu’ici, je n’ai pas besoin de vous en faire les détails. Du point de vue résultat, vous savez ce qui se passe, chacun de vous à son appréciation.
Dites-nous, c’est quoi la différence entre l’AFC et les autres partis politiques ?
Je vais vous dire une chose. C’est ce que souvent les gens aiment dire ‘’différence entre les partis politiques’’. Quand tu prends sur le plan théorique, tu verras que tous les partis politiques ont une embellie de programmes : des programmes très juteux, des programmes très ambitieux. Ce n’est pas ça moi ma vision.
Moi, je crois qu’on ne doit plus utiliser des choses pour entrainer les gens dans l’oissiage, non. Voyez plutôt qu’est ce que le leader aura fait dans son pays concrètement, à commencer par sa ville d’origine jusque sur le plan national. C'est-à-dire, le parcours administratif qu’il aura fait dans son pays.
Cela suffit pour apprécier si cet homme peut oui ou non faire quelque chose dans son pays. Tous les programmes sont beaux actuellement, mais ce n’est pas ça. Il y en a qui mettent le programme de côté, ils gouvernent à vie.
Et au moment où tu ne peux plus corriger, parce qu’il y a un élément phare qui vient pour bloquer tout le monde, c’est la Constitution. Notre appréciation de nos candidats doit partir d’un simple fait. C'est-à-dire qu’est-ce qu’il a fait dans son pays qui peut l’amener à dire qu’il peut travailler dans son pays. C’est aussi simple.
Nous, nous sommes fiers d’une chose, tout ce qu’on a eu en Guinée on a investi dans ce pays. Et nous n’accepterons jamais que ce pays souffre, parce que c’est là notre solution. Quelqu’un qui n’a pas investi dans ce pays si le pays brûle qu’est ce qu’il va faire, il va prendre sa valise et partir.
C’est quoi votre regard sur la crise socio-éducative qui perdure actuellement dans notre pays ?
Il faudrait que les dirigeants regardent la crise et la considèrent comme priorité. Plus loin, certains disent que ‘’qui construit une école, ferme une prison’’.
On dit aussi ‘’tant vaut l’éducation, tant vaut la nation’’. Tout cela, c’est des dictons qui doivent inspirer nos dirigeants. Surtout qu’on ne joue pas avec la formation. Moi je suis fondateur d’Université. Je suis dès fois dans les situations difficiles.
Et quand c’est le cas, je fais appel aux enseignants sénégalais qui viennent séjourner pour donner des cours en Guinée dans certaines matières de spécialité.
Donc au vu de tout ça, je dirais que les autorités doivent regarder le problème d’éducation avec beaucoup de pesanteur, savoir qu’on ne joue pas avec l’éducation dans un pays.
On peut prendre parfois des décisions, mais quand ça concerne l’éducation, avant de la prendre il faut se poser beaucoup de question. Surtout que c’est l’enseignement de base qui est concerné dans le cas précis. Et quand l’enseignement de base est affecté, sa répercussion se fait sur tout l’ensemble du système.
Donc dire que les enseignements ont tort ou qu’ils doivent réviser leur demande, il appartenait à l’état de montrer sa flexibilité devant l’opinion, de chercher à rapprocher les enseignants pour pouvoir trouver un terrain d’entente.
Sinon à l’allure où vont les choses, c’est la Guinée qui va perdre. Donc le problème aujourd’hui dans l’enseignement, moi je condamne l’Etat d’avoir durci le ton et d’être flexible là-dessus.
Les enseignants disaient avant que c’est non négociable, maintenant ils disent que c’est négociable, ça veut dire qu’ils ont flexibles. Alors, que l’Etat fasse un geste dans l’intérêt supérieur de la nation, c’est ce qui serait salutaire.
Nos dirigeants doivent savoir que les enfants de Guinée sont leurs enfants, ce ne sont pas des enfants de sang, mais ce sont des enfants de patrie qu’il faut défendre. Sauver l’éducation, c’est sauver la vie. Il faut qu’ils le sachent.
Quel est votre avis sur l’installation des PA sur l’axe Le Prince ?
Je n’aimerais pas qu’on militarise le pays, surtout la capitale. J’ai toujours considéré que la capitale est la vitrine d’un pays. C’est là que les étrangers rentrent. Ça ne fait pas bon image.
Que l’on voit dans les carrefours des militaires, des gendarmes, des policiers, ça ne fait vraiment pas l’image. Les conséquences sont plus fâcheuses pour le pays.
Et tous ceux qui voudraient venir vont considérer que c’est un pays militarisé. Ils vont commencer à se dire déjà qu’il y a des zones de sécurité et des zones d’insécurité dans la capitale.
Vous demandez aujourd’hui à un blanc d’aller habiter vers Kipé, il vous dira non je ne vais pas. Donc ce n’est pas une bonne chose.
Il s’agit maintenant de voir quels pouvaient être les moyens pour calmer cette grogne de la jeunesse. Aujourd’hui, il y a un peu le ras le bol, les gens ne mangent pas à leur faim au niveau de certaines couches.
Il faut que les gens comprennent. Il faut que l’Etat fasse quelque chose, partir à l’interrogation des gens pour savoir ce qui se passe, c’est aussi simple que ça.
Il y a des services déconcentrés de l’administration publique, on peut passer pour faire des meetings, parler avec les populations et rentrer en contact avec elles pour savoir ce qui ne va pas.
On a rendu cette zone de Bambéto comme une zone de rébellion. Moi je me rappelle quand nous étions au gouvernement, nous sommes allés jusqu’à parler avec les enfants et on s’est toujours compris, il n’y avait plus rien.
Mais à force de stigmatiser quelqu’un, tu le rends plus dur qu’il ne voulait l’être. Il n’y a pas deux poids deux mesures dans la gestion des affaires publiques. Il faut une décision tranchante de l’état.
Dites-nous, est ce que votre parti AFC sera candidat en 2020 ?
Je vais vous dire une chose. Moi, je suis pour l’alternance. Qui dit alternance, dit changement de pouvoir. Il faut que l’on accepte dans le pays. Je prends les pays de l’Afrique de l’ouest, le vent du changement a été accepté sauf dans les pays francophones où il y a souvent des difficultés. Je veux citer le Liberia, la Sierra Leone, le Ghana, la Gambie et le Bénin.
Alors pourquoi notre pays ne peut pas faire la même chose sauf nous confronter à des difficultés. Il va y avoir des tueries, des guerres fratricides, ça n’a pas de sens. J’ai aimé l’idée du feu Président Lansana Conté qui disait malgré son statut de militaire disait, pourquoi ne pas créer deux partis politiques en Guinée, au lieu de créer plusieurs.
Et moi tout ce que je crains, c’est qu’est ce qui peut arriver en Guinée en 2020. Et c’est la question que tout le monde se pose. Donc pour répondre à votre question, dans un climat apaisé, l’AFC est candidat en 2020.
Pour clore l’entretien, quel regard portez-vous sur les présidents guinéens?
J’ai un grand souvenir du pouvoir du président Sékou Touré que j’ai aussi côtoyé à mon très jeune âge. A l’époque, il y avait vingt et une unités industrielles en Guinée, toutes produisaient. Comme pour vous dire que si on doit faire les bilans, je dirais qu’il y a eu une mauvaise transition des militaires. Les militaires sont venus ils ont bousillé tout.
Et Sékou Touré n’a jamais accepté qu’on brade l’économie de ce pays. Et quand tu finis l’université à l’époque tu es directement admis à la fonction publique. La gestion des ressources humaines étaient son problème. Il n’acceptait pas le chômage. L’impunité dans un pays emmène la pagaille, l’anarchie et le désordre qui peuvent aboutir à une guerre.
Merci Monsieur KABA
C’est moi qui vous remercie
Entretien réalisé par Younoussa Sylla
Categorie
Commentaires