
La corruption déforme les structures fiscales ( Par Dr Mamadou Aliou BAH)
Il apparaît que la corruption déforme la structure fiscale au profit des droits de douane. Ce résultat contribue à l'explication de la forte dépendance des pays en développement aux impôts assis sur le commerce international. Il s'avère également que le civisme fiscal joue un rôle important dans la mobilisation fiscale.
Parmi les différents canaux de transmission par lesquels la corruption affecte les recettes publiques ainsi que sa structure, les dépenses publiques d'éducation et de santé (déterminant le civisme fiscal) et le revenu par tête sont les plus importants. En termes d'implication de politique, ce ne serait jamais assez d'insister sur les politiques de réduction de la corruption. Il se révèle également que les gouvernements améliorent leur performance en termes de fourniture de biens publics sociaux afin d'inciter davantage les populations à honorer leurs obligations fiscales.
Notre analyse nous donne également droit d'apporter une appréciation sur les réformes fiscales, plus spécifiquement la transition fiscalo-douanière engagée dans de nombreux pays en développement. La question de recherche est alors ainsi formulée : dans quelle mesure la transition fiscalo-douanière, qui consiste à substituer l'impôt sur les produits domestiques notamment la TVA aux tarifs et droits douaniers, est-elle pertinente dans un environnement de forte corruption ? Si nous admettons l'hypothèse selon laquelle la TVA soit moins affectée par la corruption que les autres postes des recettes fiscales, alors il y a toutes les raisons de croire aux effets positifs d'une telle politique.
Cependant, il convient d'attirer l'attention sur une transposition possible de la corruption des douanes vers la TVA. Un dernier élément important qu'il convient de souligner est la résistance de la part des autorités publiques et de certains fonctionnaires à ces réformes, car les impôts sur le commerce international jadis sources de rentes, ne le seront plus dorénavant. Des analyses plus approfondies aideraient davantage à élucider le point de vue soutenu dans les autres pays.
UN LANGAGE ET UNE ADMINISTRATION FISCALE INCOMPREHENSIBLES DU GRAND PUBLIC
En Afrique de l’Ouest, plusieurs contribuables ne connaissent pas la langue officielle usitée par l’Administration. Quand bien même tout le monde essaie de la parler, sa lecture ainsi que sa rédaction sont des soucis pour une grande frange de la population. Il n’y a qu’à voir le taux d’analphabétisme de cette partie du continent africain. Les langues officielles de ces États sont le français, l’anglais et le portugais. C’est pourquoi, pour assurer une large diffusion des textes fiscaux et leurs modalités d’application, ces États doivent utiliser divers moyens en langues locales. Une chose qu’ils ne font pas pour faciliter le message fiscal auprès de la population. Il s’agit des chansons, des affiches et de tout autre support publicitaire souvent utilisés dans le pays. La méthode est très répandue dans certains États. La télévision et la radio devraient être exploitées à cette fin, leur mission étant d’assurer une large diffusion de la règle fiscale. L’importance d’une telle diffusion tient au fait que l’incompréhension du langage fiscal ne permet pas un meilleur rapprochement des contribuables à l’Administration fiscale et concourt ainsi à l’inacceptation de l’impôt.
Dr MAMADOU ALIOU BAH, Inspecteur Principal des Impôts
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