Cinquantenaire d’une indépendance inaboutie en Afrique francophone

Les accusations de l'avocat Robert Bourgi, relayées par la presse française dès le
11 septembre 2011, braquent de nouveau les projecteurs sur les liens troubles qui
lient la classe politique, les partis politiques français avec les dirigeants africains.
« Rester dans l'ombre pour ne pas prendre des coups de soleil » était le leitmotiv,
le refrain préféré de Jacques Foccart (1913-1997) conseiller politique, secrétaire
général de l'Elysée aux affaires africaines et malgaches de 1964 à 1974; le
personnage central dans la création de la « Françafrique », une démarche
néocoloniale de la France en Afrique qui s’appuie sur des réseaux officiels mais
surtout officieux.
Je vous invite à la relecture de ma contribution lors d'une conférence-débat
organisée le 24 mars 2010 à l’université Stendhal de Grenoble (France). J'y avais
évoqué les cinquante ans de dérives, de turpitudes de la « Françafrique » aux
côtés de mon ami et prof à l'université de Lyon, écrivain et politologue Philippe
Lavodrama.

Cinquantenaire d’une indépendance inaboutie en Afrique francophone

Conférence-débat organisée par un collectif d’associations africaines et l’association
des Guinéens de l’Isère (AGIS) dans le cadre de la semaine culturelle africaine à
l’université Stendhal Grenoble III, amphi 7 / Mercredi 24 Mars 2010.
Thème : Réalité des indépendances africaines
Contribution de Nabbie Soumah : Cinquantenaire d’une indépendance inaboutie en
Afrique francophone
INTRODUCTION
L’année 1960 marque l’indépendance officielle de 17 pays d'Afrique francophone
subsaharienne ; au Maghreb, le Maroc et la Tunisie étaient déjà indépendants avant
cette année/curseur, charnière pendant que l’Algérie s’enlisait dans un conflit armé.
Membres depuis 1946 de l'Union française, nouvelle appellation de l'empire créée
par une 4ème République initialement résolue à conserver ses possessions d'outre-
mer, les colonies d'Afrique acquièrent leur indépendance de manière pacifique et
graduelle en général.
Le processus débute avec la Loi-cadre Defferre n° 56-619 du 23 juin 1956 qui les
dote d'une autonomie interne, se poursuit avec le projet de Communauté franco-
africaine proposé par Charles de Gaulle (1890-1970) en 1958 en même temps que
l’avènement de la 5ème République ; ce processus s'achève deux ans plus tard
dans un parfait synchronisme, une remarquable concomitance, voire une curieuse
coïncidence.
Qui dit indépendance sous-entends au préalable le fait colonial qui est une logique
totalitaire ; l’ordre colonial étant destructeur de valeurs sociales et culturelles.
Mais, fort heureusement, la 2ème guerre mondiale avait sonné le glas des
puissances coloniales, réveillé les nationalismes indigènes avec l’émergence
du Tiers-Monde, du mouvement des Non-alignés et la remise en question de la
domination française dans son empire colonial ; ceci grâce notamment au soutien
des nouveaux maîtres du monde qu’étaient devenus les USA et l’ex-URSS après le
partage de Yalta en février 1945 avec Franklin Delano Roosevelt (1882-1945) et
Joseph Staline (1878-1953). Sir Winston Leonard Spencer-Churchill (1874-1965)
du Royaume-Uni y fit de la figuration.
Les causes de la décolonisation de l’Afrique sont multiples mais on y observera
paradoxalement une émancipation des peuples sans une véritable indépendance.
A mon humble avis, seules l’Algérie et la Guinée ont été réellement indépendantes,
ont connu une décolonisation achevée, aboutie :- l’une par la voie des armes concrétisée par les accords d’Evian du 18 mars 1962
avec le Front de libération nationale (FLN) algérien ;
- et l’autre par la voie des urnes matérialisée par le « Non » de 95 % des suffrages
exprimés lors du référendum du 28 septembre 1958 ; le droit de faire « sécession »,
de devenir indépendant était explicitement prévu dans le projet de Communauté :
l’article 78 prévoyait le transfert de compétences communes de la Communauté
à l’un de ses membres au moyen d’accords particuliers ; tandis que l’article 86
envisageait la transformation globale du statut d’un Etat.
Mais 3 mois après ce « Non » historique, les services administratifs, les troupes, les
colons quittèrent le pays et s’appliquèrent à rendre inutilisables les infrastructures,
les plantations, etc.
Pour les autres pays, il ne serait pas faux, ni injuste de parler de 50ème anniversaire
du maintien du joug, du lien, du cordon ombilical de la dépendance de facto vis-à-vis
de la France qui est parvenue à conserver des liens « étroits » avec ses anciennes
colonies.
Il est aisé de constater, qu’à quelques variantes près, la politique africaine de
la France demeure fondamentalement inchangée depuis 1960 et que l’acte de
décès de la Françafrique n’est pas encore validé.
L’indépendance « officielle », octroyée à ces nouveaux Etats n’entraîne aucune
remise en cause fondamentale de leurs rapports avec la France qui doit faire face
actuellement à la rude concurrence de la Chine dans son « pré carré ».
L’initiative « 2010-Année de l’Afrique » sera confiée à Jacques Toubon, l’ancien
garde des Sceaux, par Nicolas Sarkozy ; il a pour mission de mettre en œuvre un
projet qui a pour objectif, selon le Président, « de souligner et de confirmer l’évolution
des relations entre la France et l’Afrique subsaharienne qui doivent rester privilégiées
tout en étant renouvelées, équilibrées et transparentes ».
L’apothéose de la commémoration du cinquantenaire aura lieu le 14 juillet prochain
avec un défilé de contingents militaires africains sur les Champs-Élysées en
présence de 14 chefs d’Etat du continent noir.
Par ailleurs, quant au nouvel ordre intérieur, au nouveau système de gouvernance
issu de ce processus de décolonisation inachevé, il s’avère malheureusement
instable et anti-démocratique sur le plan politique, socialement altéré et
économiquement anémié dans un continent qui est à la dérive, le réceptacle de tous
les malheurs de la terre, en proie à une pléthore de crises et de fléaux.
L’Afrique a été abandonnée depuis belle lurette par ses dirigeants, ses élites
et l’Occident qui lorgne vers l’Europe de l’Est et l’Asie ; certaines tendances s’y
dessinent malheureusement et persistent :
- l’absence d’une véritable alternative au modèle répressif et corrompu en dehors
de « coups d’Etat démocratiques » ;
- la sénilité croissante des pouvoirs vieillissants, fossilisés, hystériques et carnassiers
avec des successions dynastiques comme au Togo et au Gabon ;
- la misère, la désespérance sociale, l’enkystement de pans entiers de la société ;
- l’irrépressible désir de survivre, d’exode quitte à braver les mers hostiles, le désert
et des passeurs sans scrupule ;
Selon moi, les commémorations devraient s’inscrire dans une perspective de
repentance et de réparation, à l’instar de la Shoah (la solution finale) pour la
communauté juive ; l’Etat français n’a-t-il pas reconnu le 16 juillet 1995, par le biais
du Président Jacques Chirac, sa responsabilité dans le génocide juif (5 à 6 millions
de morts) ?
Sarkozy ne vient-il pas de faire un mea culpa de facto au Rwanda en reconnaissantle 25 février dernier de « graves erreurs d'appréciation et une forme d'aveuglement
de la France et de la communauté internationale pendant le génocide de 1994 » qui
aurait fait 800 000 morts selon l’ONU.
Le parlement serbe a voté le 31 mars 2010 une résolution condamnant le massacre
de 8000 musulmans bosniaques de Srebrenica en juillet 1995 par les milices serbes,
mettant ainsi fin à des années de déni.
Il faut qu’enfin l’ancienne puissance coloniale consente à reconnaître ses
responsabilités historiques et à dessiner les contours d’un véritable nouveau
partenariat équilibré avec ses anciennes colonies, d’une rupture refondatrice des
rapports franco-africains.
Par ailleurs, il serait temps de s’accorder sur une mémoire commune de la
colonisation.

I) LE FAIT COLONIAL OU LA LOGIQUE TOTALITAIRE
Quelle est la réalité du fait colonial ? Le concept de la colonisation repose en
anthropologie sur une « logique totalitaire », sur le triptyque : unicité du droit, unicité
de la pensée et unicité de la religion.
De grands savants et des penseurs européens s’étaient mis au service de la
domination et de l’avilissement de la personne humaine.

1°) La Traite négrière transatlantique et le « Code noir »
Ils sont concomitants au fait colonial ; on ne peut occulter ce sinistre Code qui était
un ensemble de textes réglant la vie des esclaves noirs dans les îles françaises de
l’Amérique, en particulier l'ordonnance de soixante articles portant statut civil et pénal
sous Louis XIV (1643-1715) en mars 1685 et concernant la discipline, le commerce
de ces esclaves issus du continent africain qui a perdu 50 à 100 millions de ses fils
les plus virils et de ses filles les plus jeunes et les plus fécondes.

2°) La théorie du « Fardeau de l'homme blanc »
Elle fut utilisée par les Européens comme une obligation de « civiliser » les «
indigènes » ; « The White Man's Burden » de Joseph Rudyard Kipling (1865-
1936), un écrivain britannique et soutien à la colonisation, fut un célèbre poème, une
injonction rhétorique attribuant à l'homme blanc le devoir de coloniser et d'administrer
les populations étrangères : c’est la justification de la colonisation en tant que
mission civilisatrice.

3°) La colonisation
C’est l’action politique, économique et militaire d’une grande puissance qui consiste à
assurer le contrôle à son profit de territoires lointains, de leurs ressources naturelles
et de leurs habitants. C’est la « mécanique des vases communicants », du «
sablier » : le pillage et l’appauvrissement de l’Afrique ont enrichi la France.
La grande puissance devient alors une métropole, les territoires deviennent des
colonies et leur ensemble devient un empire colonial.
Les puissances européennes divisèrent l'Afrique et ses ressources en zones
politiques à la conférence de Berlin de 1884 ; en 1905, elle est complètement
contrôlée à l'exception du Liberia la première nation d'Afrique indépendante depuis
1847 et de l'Ethiopie (l'Abyssinie) qui n'a jamais été colonisée.
L'Afrique a souffert, à long terme, des effets de la colonisation et de l’impérialisme,
avec la perte d'importantes ressources naturelles et humaines, l'effondrement
économique, le bouleversement culturel, une division géopolitique et unassujettissement politique.
A la fin du 19ème siècle s'était produite donc la 2ème grande vague de colonisation,
la première avait concerné l'Amérique au 16ème siècle et était surtout l’œuvre des
Portugais et des Espagnols avec une christianisation forcée, féroce des indigènes.
Pourtant, à peine assise, l'autorité des pays européens a été ébranlée par la 2ème
guerre mondiale, encourageant les élites des peuples dominés à manifester une
volonté d'autonomie, sinon d'indépendance.

II) UNE DECOLONISATION FORCEE OU L’EMANCIPATION SANS
INDEPENDANCE
Les effets de la 2ème guerre mondiale ont engendré une émancipation sans une
réelle décolonisation en Afrique francophone subsaharienne. C’est un processus
inachevé, inabouti. La seule décolonisation sans conflit a été l’italienne car le régime
s'était effondré.

1°) L'impact de la guerre de 1939-1945
Cette guerre a été un facteur d'accélération de la décolonisation avec l'adhésion de
nombreux pays à l'ONU ; d’autre part, elle a sonné le glas des puissances coloniales
et permis l’émergence de deux grands blocs sous la coupe réglée des USA et de
l’ex-URSS lors de la Guerre froide dès 1947.
Cette bipolarité du monde n’épargna pas l’Afrique qui fut, par pays interposés, un
lieu d'affrontement idéologique avec des caractères militaires, économiques ou
politiques.
En 1944, la conférence de Brazzaville a amorcé une prise de conscience des
problèmes coloniaux et ouvert des perspectives de réformes.
Dès 1946, la France s'était enlisée dans une longue guerre coloniale au Vietnam qui
s'est achevée en 1954 par la défaite de Diên Biên Phu qui a mis fin à la présence
française en Indochine consacrée par les accords de Genève du 21 juillet 1954.

2°) L'isolement des puissances coloniales dans un contexte favorable
a) La « Charte de l'Atlantique » de 1941
Cette Charte est une déclaration solennelle faite le 14 août 1941, suite à la
rencontre, à bord d'un navire de guerre dans l'Atlantique au large de Terre-Neuve
une province canadienne, entre Franklin D. Roosevelt et Winston Churchill.
Auparavant, le 6 janvier 1941, Roosevelt avait prononcé devant le Congrès des
Etats-Unis son fameux « Discours sur les Quatre Libertés » : la liberté d'expression,
du culte, la liberté de vivre à l'abri du besoin et de la peur. La charte, qui reprend
et complète ce fameux Discours « entreprend de jeter les fondements d'une
nouvelle politique internationale ». Les principes, sur lesquels Roosevelt et Churchill
s’appuieront, sont : « la condamnation de toute annexion territoriale, le principe
de l'autodétermination de chaque peuple, la coopération internationale, la liberté
commerciale et la liberté des mers, la condamnation du recours à l'usage de la force
et la réduction des armements ».
La Charte de l'Atlantique servit de base, de substratum à la Déclaration des Nations
unies signée le 1er janvier 1942 par les représentants de 26 pays en guerre contre
l'Allemagne nazie, ainsi qu'à la Charte des Nations unies signée le 26 juin 1945 à
San Francisco (USA).
Après la guerre, il y eut une pression sur les britanniques de se conformer à la
Charte de 1941; Churchill l’introduira au parlement et la transposera dans leurs
colonies après la guerre.Quant à la France, qui avait été défaite, occupée, humiliée par l’Allemagne
nazie, elle continuera de considérer ses colonies africaines d’« infantiles » et d’«
immatures » malgré leur contribution au prix du sang versé sur les champs de
bataille. Telle la bataille victorieuse de Bir Hakeim du 11 juin 1942 en Libye des
Forces françaises libres (FFL) du général Pierre Kœnig (1898-1970) contre l’Afrika
Korps du général Erwin Rommel (1891-1944).

b) Un anticolonialisme de gauche en Europe
Il s'est affirmé, s’est fondé sur des principes moraux et politiques. L'exploitation
des peuples et de leurs richesses, les crimes commis par les soldats et les colons
sont les principaux griefs faits à la colonisation. Une partie de ces anticolonialistes
s'engagent aux côtés des nationalistes, en Algérie notamment.

c) le rôle des élites noires
Durant les années 1930, une minorité d'élites leaders sont formées dans les
universités occidentales et familiarisées avec des idées comme l’autodétermination,
le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, de choisir librement la forme de leur
régime politique.
Ce principe de droit international fut proclamé dans les « Quatorze points » du
président américain Woodrow Wilson (1856-1924) le 8 janvier 1918 pour mettre fin
à la première guerre mondiale, reconstruire et légitimer les nouvelles frontières de
l’Europe ; il sera réaffirmé dans la Charte des Nations unies signée en 1945.
Parmi ces leaders nationalistes formés en Occident et qui mèneront la bataille
pour l'indépendance, on trouvera Jomo Kenyatta (1893-1978) au Kenya, Kwamé
Nkrumah (1909-1972) au Ghana, Léopold Sédar Senghor (1906-2001) au Sénégal
et Félix Houphouët-Boigny (1905-1993) en Côte d’Ivoire, entres autres.
C'est très difficile d'évaluer le rôle et le poids des élites noires dans la décolonisation.
C'est très différent et très variable d'un pays à l'autre. Ces élites concernent environ
3 % de la population. Ce sont des intellectuels qui vivent en Europe et issus
notamment de la petite bourgeoisie, des commerçants. Il faut souligner le rôle des
élites ouvrières comme les dockers, dans les chemins de fer, les mines. Ce sont les
premiers foyers de contestation.

3°) L’émergence du Tiers-monde, des Non-alignés et la marche
vers une émancipation inéluctable
Se sentant renforcés par les discours des Alliés, avec notamment la « Charte de
l'Atlantique », les nationalistes s’éveilleront et se radicaliseront à la fin de la 2ème
Guerre Mondiale. Les nouveaux « maitres » du monde que sont les USA et l’URSS,
avec l’appoint de l’ONU, encourageront la décolonisation. D’où l’indépendance des
mandats français du Proche-Orient (Liban le 22 novembre 1943 et Syrie le 17 avril
1946 et) et la fondation de la Ligue Arabe le 22 mars 1945.
En avril 1955, la conférence de Bandung (Indonésie) est à l’origine du mouvement
des pays non alignés refusant à la fois les deux blocs, soviétique et occidental ;
elle réunit 29 pays du Tiers-monde avec l’Indonésien Sukarno né Koesno
Sosrodihardjo (1901-1970), le Chinois Chou En-Lai (1898-1976), l’Indien
Jawaharial Pandit Nehru (1889-1064) et l’Egyptien Gamal Abdel Nasser (1918-
1970) ; en 1956, ils se réuniront à Brioni (Yougoslavie) à l’invitation du Maréchal
Josip Broz Tito (1953-1980).
L’émergence diplomatique et internationale des Non-alignés engendra la marche
vers une émancipation inéluctable et un encouragement à la décolonisation en Afrique.4°) Une transition pacifique et graduelle
La conférence de Brazzaville inaugurée en janvier 1944 par le général de Gaulle,
avait exclu la possibilité de toute autonomie ou indépendance des colonies, mais
prévu de leur conférer le droit d'élire des représentants dans les assemblées
nationales.
La Constitution de la 4ème République du 13 octobre 1946 intègre les colonies dans
l'Union française qui perpétue une tradition impériale oscillant entre assimilation et
intégration mais applique les dispositions de la conférence de Brazzaville.
Le 18 octobre 1946 à Bamako (Mali), se tient le congrès constitutif du
rassemblement démocratique africain (RDA), parti fédéral d'Afrique noire proche du
Parti communiste français et de l'URSS dans ses premières années, c’est la création
du premier mouvement politique panafricain.
La loi-cadre du nom du ministre de la France d'outre-mer Gaston Defferre (1918-
1986) adoptée en 1956 sous le gouvernement Guy Mollet (1905-1975), puis la
Communauté française mise en place par de Gaulle revenu au pouvoir en 1958 ont
ouvert la voie à l'indépendance.
En Afrique francophone, la transition à l'indépendance fut relativement pacifique et
en plusieurs étapes ; la majorité des territoires s'est émancipée entre 1956 et 1962,
période pendant laquelle on observe deux modes de décolonisation, deux processus
d’indépendance au sein de chaque Afrique.

a) Au Maghreb
- La Tunisie et le Maroc : en 1954, le Président du conseil (Premier ministre) Pierre-
Mendès France (1907-1982), mettant fin à une politique intransigeante et de
répression (cf. l’Indochine), avait engagé le dialogue avec les nationalistes tunisiens
et marocains. Ces deux protectorats obtiendront leur indépendance en 1956, sans
trop de violences sous la férule d’Habib Bourguiba (1903-2000) et Mohammed V
Ben Youssef (1909-1961).
- L’Algérie, qui était la seule colonie de peuplement française en Afrique, connut un
conflit douloureux. Les séquelles de ce conflit sont encore vivaces dans les rapports
entre ces deux Etats. Les Algériens de France continuent de faire les frais de cette «
sale guerre », de l'insurrection déclenchée par le FLN à la Toussaint 1954 qui a
marqué le début d'une nouvelle guerre coloniale dans laquelle la France s'est enlisée
avec les irréductibles de l'Algérie française (cf. l’OAS) et qui ne s'est achevée qu'en
1962 avec les accords d'Evian.
Pour rappel, l'Algérie avait abrité le Gouvernement provisoire de la République
française (GPRF) issu de la Résistance le 3 juin 1944 et dirigé par le général Charles
de Gaulle. Brazzaville fut la première capitale de cette Résistance, de la France libre.

b) En Afrique subsaharienne
Seule la Guinée refuse la Communauté et accède immédiatement à l'indépendance
en 1958. Toutes les autres colonies françaises « obtiennent » pacifiquement leur
indépendance en 1960 : c’est la fin de la Communauté française. En 1974 c’est au
tour des îles Comores (excepté Mayotte dont la départementalisation sera actée en
principe en 2011 avec 95,2 % de votes favorables lors du référendum du 29 mars
2009), ensuite Djibouti en 1977.

III) LA PERSISTANCE DE LA TUTELLE FRANCAISE1°) Le spectre de la Françafrique ou la restauration du paternalisme
Le spectre de la Françafrique est omniprésent et la restauration du paternalisme est
une réalité vivante dans l'Afrique francophone subsaharienne.
Dans sa conception des rapports avec l’Afrique, le général de Gaulle s’était révélé
l’héritier d’une tradition de pensée dont les origines remontent aux théoriciens de
l’expansion coloniale de la 3ème République : beaucoup plus que des mobiles
économiques, ce sont des considérations de nature politique et stratégique qui sous-
tendent ses interventions africaines.
La « zone franc », qui permet à la France de disposer de liquidités accrues, contribue
de manière non négligeable à la réalisation de l’objectif fondamental de la politique
de Gaulle qu’est la restauration du statut de la France en tant que puissance
moyenne.
Alors qu’elle avait été affaiblie par l’instabilité ministérielle et politique chronique de
la 4ème République et discréditée par ses engagements coloniaux en Indochine et
en Algérie, la France retrouve ainsi une influence dans les rapports internationaux.
Aux chefs d’Etat fidèles à la France, des garanties importantes sont offertes :
l’aide est économique et financière, avec notamment des subventions aux budgets
de fonctionnement, des aides à l’investissement ou encore des envois massifs
d’enseignants, de coopérants et de conseillers techniques. Mais le soutien français
était également d’ordre militaire et consistait en une intervention de ses troupes à la
demande des autorités en place.
Pour de Gaule « un indigène est plus un sujet qu’un citoyen » ; il a été partisan de «
l’assimilation », du double collège, de l’Algérie française et estimait que « le salut de
la France passe par l’Empire ».
« La Corrèze avant le Zambèze ! » clamait dans « Paris-Match » le journaliste
français Raymond Cartier (1904-1975) car il valait mieux investir en Métropole que
dans les colonies où « la mise à niveau allait coûter cher au budget national ».
De Gaulle à Nicolas Sarkozy en passant par Georges Pompidou (1911-1974),
Valéry Giscard d’Estaing, François Mitterrand (1916-1996) et Jacques Chirac
on constate une continuité dans la restauration du paternalisme : le sphinx «
Françafrix » renaît de ses cendres malgré les alternances politiques en France.
Il est aisé de constater, qu’à quelques variantes près, la politique africaine de
la France demeure fondamentalement inchangée et que l’acte de décès de la
Françafrique n’est pas encore validé, déclaré par le légiste français qui préfère
garder sous assistance respiratoire, artificielle un continent dans un état comateux
très avancé.
Les secrétaires d’Etat successifs à la coopération l’ont appris à leur dépends, tels
Jean-Pierre Cot avec F. Mitterrand et récemment Jean-Marie Bockel, le transfuge
du parti socialiste, renvoyé par Sarkozy à ses chères études au Secrétariat des
anciens combattants, puis à la justice sous la tutelle de Mme Alliot-Marie.

La Françafrique repose sur 3 éléments :
- le soutien inconditionnel de la France aux dictateurs et affameurs de peuples
africains ;
- le blocage de l’alternance, du changement des mœurs politiques ;
- le détournement des biens publics qui sont investis dans le Nord, leurs banques et
le financement des partis politiques français.
Sarkozy avec son conseiller et affairiste Robert Bourgi étaient à Libreville le 24
février 2010 pour « réactiver » la Françafrique et annoncer le maintien de la base
militaire française dans un pays qui regorge de richesses naturelles (pétrole, bois,etc.) contrairement au Sénégal. Jacques Foccart (1913-1997), l’homme des basses
œuvres, est mort mais Blaise Compaoré assure la continuité de la fonction : il a
joué le rôle de parrain de « chefs de guerre » en Côte d’Ivoire, au Libéria, en Sierra
Léone, en Guinée avec le CNDD version Dadis Camara, etc.
Félix Houphouët-Boigny (1905-1993), El Hadj Omar Bongo Ondimba (1935-
2009) et Gnassingbé Eyadema (1935-2005), les dinosaures et exécutants zélés
de la Françafrique, ont un excellent héritier, un homme lige avec le burkinabé Blaise
Compaoré.
Le 50ème anniversaire n’est en fait que celui du maintien du joug, du lien, du cordon
ombilical de l’interdépendance. Nombre d'anciennes colonies ont gardé des liens
très forts avec la France : économiques, diplomatiques, culturels,... C'est ce que l'on
appelle positivement la coopération et négativement le néocolonialisme.
Le nouvel Etat, qui n’est indépendant que de nom, devient l’allié objectif, le bras
séculier de l’ancienne puissance coloniale en lui « octroyant » l’exclusivité des
marchés publics stratégiques, des richesses naturelles (pétrole, bois, minerais, etc.).
Il n’y a pas de réelle liberté de choix de partenaires économiques et politiques,
malgré la pénétration de pays émergeants sur le continent, à l’instar de la Chine.
Certains régimes l’ont appris à leurs dépends :
- celui de Pascal Lissouba au Congo-Brazzaville avec la firme pétrolière française
ELF et une longue guerre civile de 1993 à 2002 ;
- celui de Mamadou Tandja au Niger avec l’uranium et AREVA, victime le 18 février
2010 d'un coup d'Etat par le Conseil suprême pour la restauration de la démocratie
(CSRD).
En retour, comme récompense, les gouvernants fidèles se voient « accorder » une
longévité au pouvoir et la possibilité de tordre le coup à la Constitution, d’assurer
une dynastie en faisant élire leur progéniture à l’instar des Bongo, Eyadéma, Kabila,
peut-être Wade demain.
« La France porte à bout de bras des régimes à bout de souffle en Afrique ! »,
s’indignait Ménélik (de son vrai nom Albert Tjamag), un rappeur franco-camerounais.
Quant à la francophonie, l’ancienne agence de coopération à Niamey qui vient de
fêter ses 40 ans avec ses 70 membres, elle demeure un des liens qui unissent la
France à ses anciennes possessions et ne sert en réalité qu’à son rayonnement
politique et culturel dans le monde.

2°) France et Chine : deux « serial concurrents » en Afrique
La France et la Chine sont devenues deux « serial concurrents » dans leurs relations
singulières avec l’Afrique, dans leur quête effrénée de parts de marchés sur le
continent noir.
Dans son discours lors de la 63ème session de l'AG de l'ONU en 2008, Nicolas
Sarkozy s'en était pris vertement à la Chine responsable, selon lui, de l’aggravation
du surendettement des pays africains à qui elle octroierait de l’aide sous forme
de prêts sans condition, sans discernement. Ceci contrairement à la doctrine «
démocratique » mitterrandienne de la Baule de juin 1990 et aux institutions
contraignantes (FMI et Banque mondiale) de Bretton Woods.
En réalité, la France est aujourd’hui sur la défensive dans son « pré carré » africain
et demeure inquiète d’y perdre pied au profit de la Chine et d’autres pays émergents.
L’ancienne puissance coloniale a perdu sur la scène internationale son poids
économique et son influence politique qui en découle. Elle est en proie, depuis
des décennies, à un déficit budgétaire chronique (144,8 milliards d’euros de déficit
public donc 7, 5 % du PIB pour l’année 2009) que fustigent les instances de l’Unioneuropéenne (cf. le seuil de 3 % des accords de Maastricht de 1992), à une balance
commerciale et des comptes publics qui sont au rouge.
Alors que la Chine, de son côté, s’est « éveillée » comme le pressentait l’homme
politique et académicien Alain Peyrefitte (1925-1999) et s’est hissée au rang de
puissance économique attrayante et performante, d’interlocutrice politique influente
dans les relations internationales, notamment vis-à-vis des USA. Son économie est
florissante avec une croissance à deux chiffres (12 % dans le 1er trimestre 2010) ;
elle détient une grande part des réserves financières mondiales. Le centre de gravité
de la production mondiale, notamment automobile (Volvo suédois a été rachetée ce
mois), se déplace vers elle.
Elle a organisé avec brio les jeux olympiques de Beijing et a été consacrée
superpuissance spatiale avec la capsule Shenzhou VII qui a été placée en orbite, le
25 septembre 2008, avec trois «taïkonautes» à son bord.
Ses articles à petits prix sont prisés et représentent une véritable aubaine pour des
populations africaines en proie à la misère. La manne financière de la Chine est
donc la bienvenue, une bouffée d’oxygène pour l’Afrique face à la rareté du crédit. A
condition qu’elle soit utilisée à bon escient et non qu’elle se dirige comme d’habitude
vers les paradis fiscaux au bénéfice de ses gouvernants. Un adage populaire ne dit-
il pas « qu’il vaut mieux un puits peu profond avec de l’eau qu’un puits profond sans
eau ! ».
La Chine est dans une posture expansionniste, offensive en Afrique avec des
projets, des financements à tour de bras. Par exemple, le géant minier anglo-
australien Rio Tinto vient d’annoncer la mise sur pied d'un projet de 2,9 milliard de
dollars (2,1 milliards d'euros) avec le groupe de métaux chinois Chinalco portant sur
le développement commun d'une activité minerai de fer à Simandou en Guinée.
Selon un adage populaire, « dans la fête des hyènes, les agneaux sont exclus !
», la compétition internationale est impitoyable. Ce géant asiatique est entrain
de creuser l’écart vis-à-vis de ses concurrents, à l’image du premier Forum du 23
septembre 2008 sur l’économie Chine-Communauté économique des Etats de
l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) qui avait mis l’accent sur les investissements dans
le développement des infrastructures, l’exploitation des ressources naturelles,
l’agriculture, la banque et d’autres secteurs.
La Chine peut y contribuer, à coup sûr, bien qu’elle ne soit pas exempte de tout
reproche, notamment dans le plagiat avec la reproduction industrielle du textile
africain au détriment des teinturières locales (cf. dans la zone industrielle de
Sanoyah en Guinée).
Mais ne dit-on pas que « les Etats n’ont pas d’amis ; mais ils n’ont que des intérêts ?
». Alors essayons habilement d’y trouver notre compte pour le salut d’une Afrique
meurtrie.
« L’Afrique ne représente que 2% du flux économique de la France. La France
économiquement n’a pas besoin de l’Afrique ! », clamait Sarkozy au Bénin le
21 mai 2006, à l’époque ministre de l’Intérieur ; mais en réalité la France sans
l’Afrique apparaît comme une mobylette sans essence dans un contexte de rivalité
économique ardue avec l’Asie.

IV) UN NOUVEL ORDRE INTERIEUR INSTABLE
DANS UN CONTINENT EN DERIVE
A la suite de la décolonisation, l'Afrique a affiché une instabilité politique, un
désastre économique et une dépendance à la dette avec un Etat désargenté et
déliquescent incapable de financer, par exemple, ses propres élections, ses projetsde développement. Le fichier électoral étant l’épine dorsale de toute élection. Par
exemple :
- le recensement électoral au Tchad, qui devait débuter dimanche 21 mars dernier,
a été repoussé sine die en raison d'un manque de moyens financiers, selon le
président de la Commission électorale (CENI), Ngarmadjal Gami.
Le calendrier initial prévoyait le recensement du 21 mars au 9 mai 2010 en vue
d'élections législatives en novembre, suivies de locales en décembre et d'une
présidentielle en avril 2011. Le budget électoral était estimé à 25 milliards de FCFA
(38 millions d'euros) mais les contributeurs internationaux attendaient le versement
effectif par l'Etat de sa part de financement avant de se manifester.
- en Centrafrique, les partenaires étrangers et principaux bailleurs de fonds présents
au comité de pilotage se sont prononcés vendredi 19 mars pour un report du double
scrutin présidentiel et législatif prévu le 25 avril, en raison de leur impréparation, de
l’énorme retard ; ils ont appuyé la position exprimée par la représentante des Nations
unies en Centrafrique, l'Ethiopienne Salhe Work Zewde.
- Une conférence internationale des donateurs en faveur de « la paix et de la stabilité
au Darfour », organisée par l'Organisation de la conférence islamique (OCI) qui
compte 57 Etats membres, n’a récolté dimanche 21 mars au Caire (Egypte) que
850 millions de dollars en faveur de projets de développement destinés à assurer le
retour de près de 3 millions de personnes déplacées lors du conflit dans cette région
de l'ouest du Soudan.
Neuf milliards de dollars américains ! C’est l’engagement d’aide pris pour Haïti (elle
n’en espérait que 3) par plus de 120 pays et organisations au terme de la rencontre
des donateurs tenue mercredi 31 mars dernier à New York. « Les promesses
dépassent nos attentes », s’est même écrié le secrétaire général des Nations unies,
Ban Ki-moon.
Ceci est la preuve du désintérêt de la communauté internationale pour l’Afrique
malgré les efforts de Georges Clooney pour le Darfour ; il y a donc deux poids deux
mesures.
Par ailleurs, la Commission européenne, avec sa ligne budgétaire intitulée « Aide à
la démocratie » du programme EuropAid, alloue des fonds aux Etats africains dans
le domaine de la coopération internationale, notamment en matière électorale. Elle
vient d’allouer 3 millions d’euro à la Guinée pour l’élection présidentielle du 27 juin
2010.
Tout ce qui ce précède et précité est la résultante d’un nouvel ordre intérieur
antidémocratique et instable dans un continent en dérive.
Par ailleurs, l’idéal panafricaniste et l’intégration régionale ne sont pas encore
devenus une réalité vivante. Il faudra écrire un nouveau corpus pour la renaissance
de l’Afrique.

1°) Un nouvel ordre intérieur anti-démocratique, socialement
altéré et économiquement anémié
Après 50 ans d’indépendance, selon Transparency International avec son indice
de perception de la corruption et d’après l’Indice de développement humain (IDH),
l’Afrique est le continent le plus pauvre de la planète ; ses populations sont frappées
de plein fouet par une pléthore de fléaux et de crises : l’insécurité (60 meurtres par
jour en Afrique du Sud) ; le terrorisme islamique par exemple en Mauritanie, au
Mali qui empêche le Rallie Paris-Dakar qui a dorénavant lieu en Amérique latine ;
les conflits ethniques ; le braconnage et le commerce international des espèces
animales en voie de disparition ; le marasme économique ; des populations enproie à la misère frappées de plein fouet par la corruption, le déficit démocratique,
l’insécurité, les guerres et les génocides avec des déplacements de populations
(cf. Rwanda, Darfour) ; après plus de 200 coups d’Etat militaires, l’influent National
Democratic Institute américain déplore la résurgence des coup de force (Mauritanie,
Guinée, Madagascar, Niger, etc.) : selon le malien Amadou Toumani Touré «
quand la démocratie passe par la fenêtre, le coup d’Etat entre par la porte » ; la
pandémie du sida et du paludisme ; un environnement pollué et délabré (dépotoir
de déchets toxiques, l’exploitation de l’uranium dans le Nord du Niger) ; les crises
alimentaire (accentuée en 2008 par la hausse des prix des matières premières et
des produits de première nécessité), énergétique (cf. les délestages) et financière (la
plus grande depuis les années 30) ; l’exode rural et l’échec des politiques urbaines et
d’aménagement du territoire avec plus de 200 millions de personnes qui vivent dans
des bidonvilles, des taudis.
La privatisation des services publics, tels l’eau, l’énergie et les télécommunications,
a engendré des effets néfastes : alors que les tarifs augmentent la qualité du service
se dégrade. Se pose également la question de la maitrise de l’eau pour irriguer les
terres arables ; terres arables qui sont soit vendues à des pays émergeants (Chine,
Inde), soit réservées à la construction de logements, à la spéculation foncière.
L’Etat y est devenu le lieu privilégié d’accaparement patrimonial où
s’accroissent les inégalités territoriales, les conflits fonciers (la terre étant un
identifiant), les replis communautaires, confessionnels comme au Nigeria (cf. les
massacres à Joss).
En somme, l’état des lieux est accablant, alarmant avec le maintien des rapports de
domination à travers notamment le mécanisme de la dette, le pillage des richesses,
l’absence de rupture initiale avec les structures économiques coloniales basées sur
l’exportation vers le marché mondial de matières premières peu ou pas transformées
sans valeur ajoutée, agricoles (cacao, café, coton, arachide, bois, etc.) ou minières.
Depuis les plans d’ajustement structurels des années 1980-1990, les Etats ont perdu
de leur pouvoir : le monde de la coopération internationale (bailleurs, FMI, Banque
mondiale, ONG) assume une partie de leurs prérogatives dans les domaines sociaux
(éducation, santé), économiques (appui à l’agriculture, infrastructures, etc.) et de la
définition même des politiques publiques ; les transferts financiers des émigrés et
l’action des firmes transnationales contribuent à relativiser le pouvoir de l’Etat.
Des violences résultent du désaccord frontalier suite au découpage
géographique fait durant la colonisation, d’un lien diffus, d’une relation complexe
entre territoires, frontières, identités, Etats, nation, aménagement des territoires,
intégration régionale et développement dans l’Afrique indépendante.
Malgré une acceptation très répandue de ce découpage, des conflits frontaliers
comme ceux entre le Tchad et la Libye, l’Ethiopie et la Somalie, le Nigeria, le
Cameroun, le Gabon, la Guinée équatoriale, la côte d’Ivoire et la Ghana pour
des gisements pétroliers off-shore, le vieux conflit du Sahara occidental avec les
populations sahraouies réparties entre le Maroc, l’Algérie et la Mauritanie, entre
autres, surgissent parfois encore aujourd'hui.
En 1964, le Maroc s’était opposé à l’adaptation par l’OUA du concept de droit
international l’« utis possidetis juris » qui veut dire « comme vous avez possédé,
vous continuerez à posséder » ou « comme chacun possède que chacun reste
sur ses positions ». Ce statu quo est illustré par « le principe de l'intangibilité des
frontières héritées de la colonisation » ; il est acté dans du marbre à l’article 2, alinéa
1 c, de la Charte du 25 mai 1963 de l’OUA (devenue l’Union africaine depuis 2001)
qui avait été créée dans le but de hâter la décolonisation et de préparer une unionéconomique africaine à l’instar de l’Europe.
Par ailleurs, à la violence coloniale à l’encontre des populations « indigènes »
s’est substituée la violence d’Etat des nouveaux pays indépendants sous diverses
formes : notamment l’utilisation systématique des forces de sécurité à l’encontre
des populations pacifiques dans l’exercice de leurs droits constitutionnels (cf. les
massacres et viols du 28 septembre 2009 en Guinée) ; les gouvernants ont déployé,
élaboré tout un arsenal juridique et répressif pour museler l’opposition, empêcher
l’alternance avec le sacro-saint principe d’atteinte à la sûreté de l’Etat qui est une
notion extensive, fourre-tout ; la loi « anti-casseur » contre le droit de manifester
qui introduit la « notion de responsabilité collective pour fait d’autrui » qui a été
condamnée par la Cour européenne de justice contre la France ; la loi scélérate de
novembre 1997 promulguée en janvier 1998 relative à la double nationalité pour
rendre inéligible des candidats issus de la diaspora guinéenne ; des audits ciblés ;
des médias au service exclusif du pouvoir (cf. RTI en Côte d’Ivoire) ; l’élection à un
tour comme au Togo et au Gabon, etc.
Tout ceci pour neutraliser toute velléité de contestation, de changement afin de se
pérenniser au pouvoir pendant des décennies avec des révisions constitutionnelles,
comme en Guinée le 11 novembre 2001 et actuellement en République
démocratique du Congo où l’article 220 de la constitution qualifie de « haute
trahison » toute tentative de modification de la constitution.
D’autre part, l’Afrique, un continent déjà assailli par la violence et la pauvreté, est
devenue la nouvelle route de la drogue. 50 tonnes de cocaïne transitent chaque
année dans l’Ouest africain qui était devenu déjà un épicentre du trafic humain,
des pierres précieuses (diamant, or, etc.), de la fausse monnaie et des armes (cf.
l’Angolagate).
L’environnement était favorable, propice car les Etats y sont désargentés par la
corruption, déliquescents, sous-équipés avec des moyens dérisoires et des frontières
poreuses. Des dégâts collatéraux dans ces « narco-Etats » sont l’insécurité, la
pandémie du sida et la prostitution.
En mars 2009, la Guinée Bissau a subi un tremblement de terre politique avec
l’assassinat du Président João Bernardo Vieira et celui du chef d’état-major des
armées Tagme Na Waie. Derrière ces règlements de comptes apparaîtrait, en
filigrane, le spectre du trafic de cocaïne qui touche le pays depuis quelques années.
L'historien camerounais Achille Mbembe dresse également un bilan accablant et
alarmant des 50 années de l'Afrique indépendante : « Dans la plupart des cas, les
Africains ne sont toujours pas à même de choisir librement leurs dirigeants. Trop de
pays sont toujours à la merci de satrapes (despotes) dont l’objectif unique est de
rester au pouvoir à vie. Du coup, la plupart des élections sont truquées. On sacrifie
aux aspects procéduraux les plus élémentaires de la concurrence, mais l’on garde
le contrôle sur les principaux leviers de la bureaucratie, de l’économie, et surtout
de l’armée, de la police et des milices. La possibilité de renverser le gouvernement
par la voie des urnes n’existant pratiquement pas, seul l’assassinat, la rébellion
ou le soulèvement armé peuvent contredire le principe de la continuation indéfinie
au pouvoir. Globalement, les choses sont donc plutôt bloquées, surtout en Afrique
francophone où, les manipulations électorales et les successions de père en fils
aidant, l’on peut dire que l’on vit, de facto, sous des chefferies masquées (…) C’est
un continent où le pouvoir de tuer reste plus ou moins illimité et où la pauvreté et la
maladie rendent l’existence si précaire ».

2°) L’échec de l’idéal panafricaniste et de l’intégration régionaleQue reste-t-il du panafricanisme ? Certains, à l’instar du doyen guinéen Vanfing
Koné, souhaitent promouvoir le « Panégrisme » en réaction à certains événements
avec ce questionnement : pourquoi la création de l’Union du Maghreb arabe le 17
février 1989 alors qu’existait l’OUA depuis 1963 ? Pourquoi Mouammar Kadhafi
s’acharne-t-il contre les Noirs résidant en Libye ? Pourquoi vient-on imposer
récemment en mars 2010 l’arabe comme langue administrative en Mauritanie alors
qu’existent le Wolof et le Soninké ? L’Egyptien Gamal Abdel Nasser aurait déclaré
que « grâce à l’Islam l’Afrique noire restera l’arrière-cour du monde arabe ! ».
La naissance en Janvier 1959, mais suivie d’une mort prématurée, de l'éphémère
Fédération du Mali caractérisait un bel exemple de l’idéal panafricaniste. 4 Etats
autonomes d'Afrique occidentale, le Dahomey, la Haute Volta, le Soudan et le
Sénégal s'unissent et la créent.
Quelques mois plus tard, cette Fédération, devenue indépendante le 20 juin 1960, se
limitaient aux seuls Soudan et Sénégal ; mais le 20 août 1960, c'est la rupture entre
ces deux Etats.
Né à l’aube des premières indépendances, le concept des Etats-Unis d’Afrique,
repris récemment par Kadhafi, avait suscité bien des espoirs sur un continent qui
se « libérait » du joug colonial. Avant de s’enliser peu à peu dans des querelles de
chefs, d’une part, et la crainte de la France de voir l’émergence d’un grand ensemble
politique et économique qui lui ferait concurrence ou qui ne serait pas sous sa tutelle,
d’autre part.
Plus d’un demi-siècle après les 6ème et 7ème conférences panafricaines (1953 et
1958) durant lesquelles Kwame Nkrumah, le chantre de l’idéal panafricaniste, prôna
la création d’un gouvernement continental central, les Etats-Unis d’Afrique relèvent
encore de la politique-fiction. C’est le serpent de mer, l’arlésienne.
Le projet traîne car il y a trop d’intérêts divergents. Les Etats-Unis d’Afrique avaient
un sens au lendemain des indépendances car ils s’inscrivaient dans une perspective
tiers-mondiste. Mais aujourd’hui la plupart des pays du continent se sont convertis à
l’économie de marché, c’est donc tout le concept qu’il faut retravailler en amont.
Il y eut un clivage, une dichotomie entre panafricanistes « maximalistes » et
panafricanistes « modérés » : la querelle ne date pas d’hier. En 1963, déjà,
l’accouchement douloureux, aux forceps de l’OUA avait opposé des leaders radicaux
(Kwame Nkrumah et Sékou Touré) aux tenants d'une avance progressive, graduelle
(Léopold Sédar Senghor et Félix Houphouët-Boigny). Actuellement, les Etats,
notamment les nouveaux d’Afrique australe, demeurent attachés viscéralement à
leur souveraineté.
Les crises alimentaire, énergétique, économique soulignent les besoins de régulation
d’un monde interconnecté de plus en plus complexe et posent la question de la
pertinence de l’échelle nationale et du rôle de l’Etat dans ces régulations.
On constate, à regret, qu’il n’y a pas d’intégration régionale réelle sur le plan
économique et politique, ni l’émergence d’un grand ensemble de pays émergents à
l’instar de l’Union européenne ; l’ALÉNA ou Accord de libre-échange nord-américain
en janvier 1994 entre le Canada, les Etats-Unis et le Mexique ; le MERCOSUR
ou Traité d'Asunción de 1991 ou marché commun du Cône Sud ; la CARICOM, la
communauté et le marché des Caraïbes de 1973 ; l’Association des nations de l'Asie
du Sud-Est (ANASE ou ASEAN) de 1967 ; etc.
Dans l’imbroglio régional africain, cinq communautés dominent le paysage de
l’intégration : la CEDEAO en 1975, la CEEAC, l’IGAD (Autorité intergouvernementale
pour le développement résulte d’un accord du 16 mars 2010 entre le gouvernement
somalien et le mouvement Ahlu Sunna Wal Jama sous les auspices de l’UA), laSADC (Communauté de développement d’Afrique australe) en 1979 puis 1992 et
l’Union du Maghreb Arabe (UMA).
A l’instar de l’UA, ces instances communautaires sont inefficaces et à la remorque
des événements : la non utilisation efficiente des organes, des mécanismes d’alerte
pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits. Dans l’architecture
africaine de paix et de sécurité : le Conseil de Paix et de la Sécurité a remplacé le «
Mécanisme pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits » de l’OUA. Au
niveau régional, ce sont les CERS.
L’OUA avait proscrit à Alger en juillet 1999 les coups d’Etat, c’est-à-dire l’accession
au pouvoir par des voies anticonstitutionnelles. L’UA a repris, dans l’accord de
Lomé du 11 juillet 2000, cette disposition restrictive ainsi que l’article 96 de l'accord
de Cotonou du 23 juin 2000 entre l'Union européenne et les Etats d’Afrique, des
Caraïbes et du Pacifique.
Mais les sanctions ciblées militaires et civils prises par des instances
communautaires à la remorque des événements (cf. embargo sur les armes, gel
d’avoirs, pas de visas, etc.) ont rarement abouti à déloger un régime dictatorial
récalcitrant.
Par ailleurs, la création du Nouveau Partenariat pour le développement de l'Afrique
(NEPAD) en 2001 par 5 Etats africains (Afrique du Sud, Algérie, Egypte, Nigeria,
Sénégal) est un échec retentissant : ce sont des projets élaborés par des pays du
Sud mais qui requièrent un financement des pays de l’hémisphère Nord.

V) POUR UN VERITABLE PARTENARIAT EQUILIBRE
ET UN DEVOIR DE MÉMOIRE
« Pour avoir droit au pardon, à la rémission, il faut au préalable faire acte de
repentance, de remords ! ». Cet axiome indique un préalable, le prix minimal de
la réconciliation, de la refondation des rapports entre la France et ses anciennes
colonies. Pour parvenir à des rapports réellement équilibrés et privilégiés.

1°) S’accorder sur une mémoire commune de la colonisation
La France, contrairement à d’autres anciennes puissances coloniales, a du mal à
solder, apurer son passé colonial et faire son aggiornamento. Par exemple :
- La loi n° 2005-158 du 23 février 2005 « portant reconnaissance de la Nation et
contribution nationale en faveur des Français rapatriés » avait suscité une polémique
dans son article 4 dont le 2ème alinéa stipule que : « les programmes scolaires
reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer ».
- Le discours scandaleux et ignominieux sur l’homme africain de Sarkozy à
l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Sénégal) le 26 juillet 2007 a suscité
une vive émotion sur le continent africain et dans le monde ; il dénote soit une
méconnaissance de l’Afrique, soit du mépris de la part de son auteur. Selon lui, « le
drame de l'Afrique, c'est que homme africain n'est pas assez entré dans l'histoire ».
- La non-revalorisation de la pension de retraite des anciens combattants africains :
ces « oubliés de la République » subissent une profonde disparité par rapport à
leurs ex-compagnons d’armes de la Métropole. Il a fallu que le film « Indigènes » de
Rachid Bouchareb soit primé au festival de Cannes en 2006 pour que la question
des « tirailleurs » redevienne d’actualité.
Le devoir de mémoire et la réécriture objective et dénuée de passion de l’histoire
coloniale de la France s’imposent : c’est l’un des passages obligés pour apaiser
les cœurs et exorciser de légitimes frustrations. Et surtout réconcilier l’Afrique et la
France à condition que cette dernière conçoive de couper le cordon ombilical de latutelle et travaille à un véritable partenariat équilibré et privilégié.
Les commémorations doivent s’inscrire dans une perspective de repentance et
de réparation ; il faut qu’enfin les anciennes puissances coloniales consentent à
reconnaître leurs responsabilités historiques.
A quoi servirait la loi n° 2001-434 du 21 mai 2001 dite Taubira « tendant à la
reconnaissance des traites et des esclavages comme crime contre l’humanité »,
loi adoptée sous le gouvernement Jospin, si elle n’est pas suivie de réparation, de
compensation ?
A quoi sert la Cité nationale de l’histoire et de l’immigration (CNHI) qui n’a jamais été
inaugurée officiellement et qui est toujours boycottée par les pouvoirs publics ?
Pour rappel : 20 à 25 % des Français sont issus de parents immigrés. La France
aurait-elle honte de revisiter son histoire ? Le 23 août 2009, à l’occasion de la
journée internationale du souvenir de la traite des Noirs, plusieurs organisations
françaises avaient lancé une campagne de sensibilisation.
En Belgique, le collectif Mémoires Coloniales travaille dans le même sens, en
réclamant, entre autres, que soient apposées sur les monuments coloniaux des
plaques explicatives.

2°) Dessiner ensemble les contours d’un véritable partenariat
équilibré, d’une rupture refondatrice
Le modèle britannique d’émancipation nationale avec décolonisation est à saluer :
les exemples du Ghana et de l’Inde indépendante le 15 août 1947 admis au sein du
Commonwealth sans accepter le principe de « l’indivisibilité de la couronne
britannique » et où « les relations sont restées privilégiées tout en étant renouvelées,
équilibrées et transparentes ».
Les pays anglophones, sauf le Zimbabwe, ont déjà fait leur mue démocratique ; le
Ghana est une singularité démocratique en Afrique, avec notamment une nouvelle
alternance réussie lors de l’élection présidentielle de décembre 2008.
La décolonisation française a été ratée en Algérie, en Indochine et en Guinée, mais
le paternalisme demeure prégnant dans l'Afrique francophone subsaharienne. Il est
grand temps d’y dessiner les contours d’un véritable partenariat.

CONCLUSION : LA DOUBLE PEINE
« Là où la lucidité règne, l’échelle des valeurs devient inutile » disait l’écrivain,
dramaturge, philosophe et essayiste français Albert Camus (1913-1960) dans
son ouvrage « Le mythe de Sisyphe » publié en 1942. En Guinée, en particulier, et
en Afrique, in extenso, les gouvernants n’ont eu ni la lucidité, ni l’observance des
valeurs ; raison pour laquelle le continent noir est devenu le cimetière des valeurs
après 50 ans d’indépendance.
Le président américain Barack Obama s’adressa au parlement ghanéen le 12 juillet
2009 en ces termes : « l’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts, mais de fortes
institutions ».
Effectivement, elle a aujourd’hui une impérieuse nécessité de fortes institutions
pour faire face à deux enjeux majeurs : s’affranchir de la mauvaise gouvernance
récurrente (des conflits, du sous-développement) et mettre fin au paternalisme
français ; les deux étant ombilicalement, intimement liés.
En France et en Belgique, les gouvernements et les grands médias ne manqueront
pas le rendez-vous de la commémoration du cinquantenaire de l’indépendance de
leurs anciennes colonies. Seul problème : ces commémorations officielles se feront
dans un déni d’histoire pour les peuples colonisés.L’apothéose de ce jubilé, après le sommet des chefs d’Etat le 13 juillet prochain,
aura lieu le lendemain avec un défilé de contingents militaires africains sur les
Champs-Élysées en présence de chefs d’Etat du continent noir ; ce jubilé risque
d’être ressenti comme une « double peine » : après la colonisation hier, ce sera la
célébration de la Françafrique, un pied de nez aux populations en proie à la misère
et la désespérance sociale.
Plusieurs voix se sont déjà élevées contre cette mascarade, comme celle d’Amadou
Seydou Traoré, le doyen de l’US-RDA (Union soudanaise-Rassemblement
démocratique africain) qui a déclaré en octobre dernier, à l’occasion d’une
conférence sur l’accession du Mali à l’indépendance que « le cinquantenaire du Mali
est une injure à la mémoire des combattants, des résistants à la pénétration coloniale
et à la mémoire de ceux qui ont donné leur vie pour que ce pays soit indépendant ».
Par ailleurs, il faut espérer une France plus ouverte, généreuse où l’on doit cesser
de stigmatiser systématiquement, pour des raisons électoralistes notamment, les
musulmans, les immigrés dont les parents ont versé leur sang pour que la France
recouvre sa liberté, son intégrité territoriale, sa dignité.
Leurs enfants ont contribué à la renommée de la France dans divers domaines :
l’écrivain Maryse N’Diaye primée au Goncourt 2009 (« Trois femmes puissantes »,
Edition Gallimard) ; Basile Boli et Abédi Pelé vainqueurs en 1993 de la Ligue des
champions de football ; Zinedine Zidane et Marcel Dessailly vainqueurs en 1998 de
la Coupe du monde,entre autres.
Barack Obama, le 4 juin 2009 au Caire (Egypte) s’était érigé en apôtre de la
tolérance : « Le monde musulman ne peut se résumer au terrorisme et au
fanatisme ». Il avait « invité les pays européens de tradition judéo-chrétienne à ne
pas empêcher le libre exercice de la religion musulmane sur leur territoire, y compris
dans ses aspects vestimentaires ».
« La France n’est elle-même que lorsqu’elle est la France de tous les Hommes ! »
clamait hier André Malraux (1901-1976).
Selon moi « la France est plus belle en multicolore ! ».
Remerciement aux jeunes de l’AGIS et du Collectif qui m’ont invité à Grenoble, ville
universitaire, ville du savoir, ville de l’excellence ; je souhaiterais leur souligner ceci :
- « l’Ecole, avec l’université comme étape suprême du cursus de l’acquisition du
savoir et de l’épanouissement, est une institution cardinale de la République » ;
- « la jeunesse est le ferment, l’avenir, l’espoir de toute nation » ;
- comme vous, chers étudiants, compatriotes et amis de la Guinée ici présents, j’ai
toujours une soif de savoir inextinguible et toujours en apprentissage de la vie.
Vive la Renaissance africaine et la rupture refondatrice des rapports franco-africains !
Que Dieu préserve la Guinée et l’Afrique !

Nabbie Ibrahim « Baby » SOUMAH
Juriste et anthropologue guinéen
nabbie_soumah@yahoo.fr

Paris, le 24 mars 2010

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